Patrick Robo

Formateur-consultant, Béziers
patrick.robo@laposte.net

 

Résumé

Cet article relate sous forme de simple témoignage la formation-supervision développée durant sept années pour un groupe de cadres de santé formateurs développant l’analyse de pratiques professionnelles (APP) auprès d’étudiants. À partir d’une demande d’aide originelle et de la genèse de l’APP dans un Institut de Formation en Soins Infirmiers, il présente la mise en place institutionnelle puis la mise en œuvre de cette supervision avec une focale sur certains objets travaillés ; il évoque ensuite des effets qu’elle produit tant sur ces formateurs que sur les étudiants, l’équipe des formateurs de l’institut et sur l’institution. Enfin, il expose les évolutions de la réflexion et des pratiques de ce groupe dans la durée avant d’envisager quelques perspectives.

Mots-clés 

supervision, formation continue, accompagnement, intelligence collective, (co)animation

Catégorie d’article 

Expérience pratique, témoignage

Référencement 

Robo, P. (2021). Supervision de cadres de santé – formateurs pratiquant des temps d’analyse de pratiques professionnelles. Revue de l’analyse de pratiques professionnelles, 21, 72-115. https://www.analysedepratique.org/?p=5173

 


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Supervision of health executives – trainers practicing APP
Abstract

This article relates, in the form of a simple testimony, the training-supervision developed over seven years for a group of health care executives who were developing APP with students. Starting from an original request for help and the genesis of APP in a Nursing Training Institute, it presents the institutional setting up and then the implementation of this supervision with a focus on certain objects worked on; it then evokes the effects that it produces as much on these trainers as on the students, the institute’s team of trainers and on the institution. Finally, it describes the evolution of the reflection and practices of this group over time before considering some perspectives.

Keywords

supervision, continuing education, support, collective skills development, (co)facilitation


 

« Il ne suffit pas de connaître la théorie
pour agir correctement.
 »

Wilhelm Reich

Cette « supervision[1] de cadres formateurs de santé[2] » relève de formation de formateurs dans le cadre de la formation professionnelle continue de ces personnels, initiée à leur demande, acceptée par la direction de l’IFSI[3] et prise en charge par le CHU[4] local.

Qu’en est-il de cette formation qui s’est déroulée durant sept années ? J’en présenterai d’abord les soubassements/fondations à partir d’un bref historique, suite à une demande d’aide qui en est à l’origine. Je relaterai ensuite sa mise en place institutionnelle puis sa mise en œuvre en réalisant une focale sur certains objets de travail-réflexion saillants rencontrés dans ce cheminement ; j’évoquerai ensuite des effets qu’elle a pu produire tant sur ces formateurs que sur les étudiants, sur l’équipe des formateurs de l’institut et qu’elle pourrait produire sur l’institution de santé elle-même. J’exposerai enfin les évolutions de la réflexion et des pratiques de ce groupe dans la durée avant d’envisager quelques perspectives possibles.

Ce témoignage, certes un peu long, peut se lire par chapitres grâce au sommaire interactif.

1. Origine et bref historique de cette formation de formateurs

Quel fut le déclencheur de cette formation que j’ai accompagnée durant sept années dans « une double dimension de relation et de cheminement (…) ; être avec et aller vers, sur la base d’une valeur symbolique, celle du partage » (Paul, 2009) ?

En avril 2014, j’ai reçu un courriel d’une formatrice-cadre de santé d’un Institut de Formation en Soins Infirmiers (IFSI) avec cette demande : « Le nouveau référentiel de formation de 2009 préconise le développement de la posture réflexive et après avoir été formés à l’IFCS[5], nous avons mis en place un atelier au retour de chaque stage ; il y en a donc deux par an. Toute l’équipe participe même si certains sont plus à l’aise que d’autres ; nous assurons l’animation en binôme ce qui nous sécurise et nous oblige à travailler ensemble. Dès la fin de deuxième année, nous invitons les étudiants à coanimer soit avec un formateur soit à deux étudiants. En troisième année ils sont autonomes même si un formateur participe comme « garant ». Les étudiants ont tout de suite adhéré à l’exercice. Si au début ils se sentent contraints par la méthode, dès la première fois ils en mesurent l’effet. Aujourd’hui nous sommes bloqués dans la réalisation et l’amélioration de la méta-analyse. Les prochains ateliers sont programmés pour les 2° année au mois de juin. Si vous pouvez vous joindre à nous pour nous aider à progresser, soyez le bienvenu . »

Toujours intéressé par ce qui questionne l’APP, j’ai pris contact téléphoniquement avec cette formatrice pour en savoir un peu plus. C’est ainsi que j’ai appris qu’ils développaient des ateliers consacrés à la posture réflexive en utilisant le protocole[6] du GFAPP (à savoir la grille des phases pour des Groupes de Formation à et par l’APP)[7] qui leur avait été fourni à l’IFCS, et j’ai alors décidé de répondre favorablement à l’invitation qui m’était faite.

Rendez-vous a été pris pour mi-juin avec la proposition suivante de la formatrice :

« Voici ce qui pourrait être réalisé avec vous : 

–  Supervision directe de deux formateurs sur une séquence à partir de 13h jusqu’à 16h,

–  Échanges avec retour en ami-critique avec ces deux formateurs plus d’autres formateurs.

Le directeur souhaite participer à cette étape (16h – 18h).

Le directeur est d’accord pour envisager avec vous l’an prochain un projet développé avec la formation continue et l’IFSI. Ce temps de rencontre pourrait permettre de savoir d’où on part et vers quoi vous pouvez nous accompagner en développement des compétences. »

Donc comme point de départ, une demande d’aide pour la gestion de la méta-analyse[8] lors de séances d’analyse en lien avec les pratiques en stage des étudiants.

Ceci a déclenché ma curiosité et mon intérêt, et je suis allé d’abord assister à un atelier coanimé par deux formatrices acceptant ma présence après avoir d’abord évoqué avec elles quelle serait ma posture et mon objectif dans cette séance, à savoir observateur muet relevant des informations sur la mise en œuvre de l’atelier afin d’échanger ensuite avec un groupe de formateurs à partir d’un questionnement de ma part.

Lors de cette séance qui n’était pas la première pour ce groupe, il a été bien précisé aux étudiants en quoi consistait ma présence et que je m’engageais sur le principe de la confidentialité. La séance, intitulée APR (apprentissage de la posture réflexive) fut riche et intéressante à plusieurs points de vue et je l’ai dit aux deux formatrices à la sortie.

Dans la foulée je suis allé à la rencontre d’un groupe d’une quinzaine de formateurs, dont les deux co-animatrices, et du Directeur de l’établissement, avec trois pages de notes prises durant la séance. Après un rapide tour de présentations mutuelles, j’ai ensuite écouté la description de leur dispositif global dit d’APP en relation avec le projet pédagogique de l’établissement puis celle de leurs pratiques à ce niveau. Je leur ai ensuite demandé d’apporter des précisions quant à certains termes qui avaient été employés (ateliers, réflexivité, postures réflexives, situations, pratiques…) et de dire quels étaient les objectifs visés à travers ces ateliers.

Ensuite, comme demandé, je me suis livré à un retour sur l’atelier auquel j’avais participé ; après l’expression de mon ressenti positif sur la séance observée, j’ai évoqué un certain nombre de questions et points qui, à mon avis, mériteraient réflexion, et ce en ouvrant des pistes possibles :

  • Pourquoi choisir pour ces ateliers l’appellation Apprentissage de la posture réflexive plutôt qu’Analyse de pratiques professionnelles ? Quelle différence ?
  • Quels sont les objectifs d’une séance d’analyse et comment les présenter aux étudiants ?
  • Analyse-t-on des situations et/ou des pratiques professionnelles ?
  • Quel est le cadre d’une séance et à quels éléments le constituant penser ?
  • Quel(s) protocole(s), quelles modalités[9] peut-on utiliser pour de tels ateliers ?
  • À quoi peut servir la méta-analyse ?
  • Quelle(s) posture(s) adopter en tant que formateur coanimant ces séances ?
  • Comment les binômes de coanimation sont-ils constitués, est-ce que les coanimations sont préparées en amont et quels types de coanimations ?
  • Comment sont constitués les groupes d’étudiants ; sont-ils chaque fois avec les mêmes binômes de coanimation ?
  • Faut-il ou peut-on fournir aux étudiants des documents (des outils) relatifs au déroulé de ces séances ?
  • Quelles sont la place et l’articulation de ces ateliers dans le plan de formation de l’établissement ?
  • Quand on se lance dans de telles démarches d’analyse, a-t-on besoin, en tant que formateurs, d’une formation, d’un accompagnement ?
  • Quid de la légitimité de formateurs pour développer de l’APP ?

Vu le temps imparti lors de ce retour, quelques échanges brefs ont eu lieu sur certaines de ces questions, mon intention n’étant pas d’apporter des réponses sur le champ, mais d’ouvrir à des réflexions ultérieures à partir de tout ce questionnement, faisant l’hypothèse que cela pouvait aider à une clarification de la mise en œuvre de ces ateliers et de l’APP dans l’institut. J’ajoute qu’au cours de ces échanges, il a aussi été évoqué leurs formations (ou pas) à l’APP, l’APP dans le portfolio, une charte pour les formateurs, l’élaboration d’outils pour analyser et/ou animer, le calendrier des APP, etc. et de nouvelles questions que j’ai relevées ont été posées par les participants. La spirale de la réflexion partagée inspirée de l’idée de « pédagogie spiralaire »[10] (Bruner, 1960) était bien enclenchée.

De cette première rencontre ont été retenus en particulier un besoin de clarifications sémantique et théorique, de clarification des objectifs de ce groupe dit d’APP et de ceux liés au travail avec les étudiants, ainsi qu’un besoin d’accompagnement de ces formateurs dans leurs pratiques d’APP.

Suite à cela, ces formateurs ont déposé auprès du Directeur de l’IFSI une demande de « formation-supervision[11] » par mes soins et pour une année, dans le cadre de leur formation continue, demande qui fut accordée à raison de l’équivalent de demi-journées de quatre heures chacune : trois demi-journées fin 2014 et six demi-journées plus une journée entière en 2015. Le bilan réalisé à l’issue de cette première année fit apparaître le souhait d’aller plus loin dans cette formation et une demande de formation complémentaire équivalente en nombre de séances a été déposée et fut également accordée en 2016. Ce scénario s’est encore renouvelé en 2017 avec huit séances, puis en 2018 avec six séances et après la quatrième année un complément de formation fut à nouveau demandé et accordé en 2019 pour l’équivalent cette fois de quatre demi-journées sur une cinquième année à l’issue de laquelle s’est dessiné le besoin d’aller encore plus loin dans la perspective de développer plus tard de la formation à et par l’APP par ces formateurs pour d’autres formateurs de l’IFSI. Une sixième année fut alors accordée par la Direction de l’établissement avec cinq demi-journées en 2020. L’équipe souhaitant poursuivre la supervision avec moi a obtenu deux demi-journées en 2021pour une septième année. À l’issue de la deuxième rencontre, le souhait de poursuivre avec deux nouvelles rencontres en 2022 a été émis par le groupe, mais non satisfait faute de financement pour cette formation continue.

2. Genèse de l’APP et de la supervision dans cet IFSI

À l’origine du développement de l’APP en IFSI se trouve le référentiel de formation des étudiants infirmiers de juillet 2009[12]. Il y est question de réflexivité en seulement cinq occurrences : l’étudiant doit devenir un praticien réflexif ayant une posture réflexive, capable de développer la pratique réflexive par l’entraînement réflexif.

Le référentiel stipule aussi que l’étudiant doit posséder des capacités d’analyse, et pour ce qui est d’analyser, il fait référence avec des terminologies différentes à diverses analyses : de soins, d’informations, de dynamiques relationnelles, d’éléments de la prescription médicale, de données scientifiques ou professionnelles, de conflits sociocognitifs, de réalités professionnelles, de l’activité, de toute situation de santé, de situations professionnelles, de situations préparées par les formateurs, de situations vécues en stage, de la pratique, de sa pratique, de la qualité de sa pratique ; il est aussi question de démarche d’analyse critique, d’analyse commentée et d’auto-analyse. Il est à noter que la juxtaposition des termes analyse et pratique(s) n’apparaît que cinq fois dans le référentiel et qu’il en est de même pour la juxtaposition analyse et situations.

D’après les informations que j’ai pu recueillir auprès de formateurs de divers IFSI, il apparaît que parfois analyse de pratiques et réflexivité sont considérées comme synonymes, que souvent l’APP est considérée comme permettant de développer la réflexivité et que des ateliers ou séances d’APP sont mis en place au retour de stages des étudiants (deux ou trois fois par an) bien que le référentiel prévoit des regroupements entre les étudiants, les formateurs et les professionnels permettant de réaliser des analyses de la pratique professionnelle pendant la durée des stages.

Qu’en est-il dans cet IFSI en particulier ? Les formateurs m’ont dit s’être trouvés à la rentrée de 2009 devant une double injonction, à savoir d’une part poursuivre et terminer la formation des étudiants inscrits dans le cursus du programme de 1992 et d’autre part initier et mettre en œuvre la nouvelle formation en fonction du nouveau référentiel, avec de l’APP, pour les nouvelles promotions d’étudiants. Ils faisaient également état de difficultés liées au fait que tous les formateurs n’étaient pas formés aux pratiques de l’APP ou que, s’ils avaient été formés ce n’était pas avec les mêmes approches de l’APP.

Après la publication de l’arrêté de 2009, une formation de base (initiale) à l’APP a été mise en œuvre pour tous les formateurs de cet IFSI par l’IFCS local dont les propres formateurs avaient eux-mêmes bénéficié antérieurement d’une formation à l’APP par divers intervenants extérieurs dont moi-même (formation en deux fois deux jours séparée par un temps d’expérimentation). À partir de là, en 2011 et suivant le souhait de la Direction, des formateurs de l’IFSI avaient programmé des temps « dits d’APP » pour les étudiants, en mono-animations, deux fois par an, au retour de stages qu’ils effectuaient dans divers services de santé. Entre-temps une réflexion avait été mise en œuvre au niveau du CEFIEC[13] régional autour de l’APP consistant à du partage et des échanges entre des représentants de formateurs et des directeurs des IFSI de la région.

À la suite de cela une réflexion, pilotée par la formatrice qui m’a contacté, s’est développée dans cet IFSI pour penser le développement de l’APP lors des retours de stages. Il a été décidé, deux ans après l’arrivée du nouveau référentiel, de mettre en œuvre l’APP sous forme d’ateliers d’« Apprentissage de la Posture Réflexive » (APR) pour les étudiants, et ce en appliquant ce que les formateurs avaient « appris » à l’IFCS en utilisant ma grille des phases du GFAPP récupérée lors de cette formation pour les cadres de santé.

Ces APR[14] regroupaient chaque fois douze étudiants infirmiers de chaque promotion qui en comprenait environ 150 à 160 et ils étaient coanimés par un binôme de formateurs volontaires. Chemin faisant des APR ont aussi été proposés aux élèves aides-soignants de l’établissement.

Ils ont fonctionné ainsi pendant deux ans au bout desquels certains constats ont été dressés : des formateurs ne se proposaient pas pour coanimer, ou s’ils acceptaient ils demandaient à pouvoir choisir leur binôme, car la coanimation conduisant à œuvrer devant/avec un collègue n’existait pas auparavant dans l’IFSI. Une autre difficulté constatée était liée à la posture des formateurs-animateurs : comment se départir de celle du « formateur sachant » qui transmet les bonnes réponses, les « bonnes pratiques », des savoirs académiques… et adopter une posture d’animateur, d’accompagnant conduisant alors à taire son (supposé) savoir pendant les ateliers. D’autres difficultés ont aussi été constatées : poser et faire tenir le cadre de ces ateliers, conduire les méta-analyses, etc. Il est également apparu le besoin de clarifier les objectifs de l’APP pour les formateurs ainsi que les objectifs de l’APP auprès des étudiants.

À partir de ces constats, voire difficultés et comme déjà évoqué dans le bref historique de cette formation de formateurs, j’ai été sollicité en avril 2014, puis invité par cette formatrice, avec le soutien du Directeur de l’IFSI, à rencontrer le groupe de formateurs volontaires pour réfléchir à la démarche d’APP, et éventuellement « les aider à progresser », compte tenu du fait que j’étais le concepteur du GFAPP. J’étais alors informé que la Directrice et une formatrice de l’IFCS qui avaient assuré la formation des formateurs de l’IFSI allaient animer cette année une analyse des pratiques pour eux en deux demi-groupes (une séance en mai et une en octobre) et que c’était la première fois que cela était mis en place.

Après des échanges à distance avec la coordinatrice, j’ai rencontré un mois plus tard, en juin 2014, l’équipe de « formateurs APP ». Ce qui a conduit progressivement et de manière concomitante à l’évolution des APR (ateliers d’« Apprentissage de la Posture Réflexive ») en APP (ateliers d’« Analyse de Pratiques Professionnelles ») à destination des étudiants ainsi qu’à la mise en place de la supervision des formateurs concernés. Cette rencontre a donc été le point de départ d’ateliers APP pour les étudiants et d’une « formation accompagnante » pour les formateurs qui se poursuivent à ce jour.

3. Mise en place de cette supervision

C’est donc à la suite des échanges avec la coordinatrice et de la première rencontre avec ce groupe en juin 2014 qui a permis, entre autres, de commencer à dresser avec eux un état des lieux de leurs pratiques, questions et besoins en matière d’APP, qu’est apparu le souhait d’une supervision pour les formateurs volontaires désireux de développer de l’APP auprès des étudiants.

Ultérieurement, des échanges à distance avec la coordinatrice pour esquisser ce que pourrait être cette formation ont permis d’évoquer des éléments à prendre en compte pour un tel projet, à savoir :

  • La question de la (non) formation antérieure à l’APP des formateurs concernés[15],
  • Les objectifs : développer le savoir analyser des pratiques professionnelles (Robo, 2003) ainsi que le savoir développer de l’APP pour les étudiants et animer des groupes d’APP,
  • Les contenus : théoriques et pratiques  liés à l’APP,
  • Les finalités : permettre aux formateurs et aux étudiants d’être mieux à même d’analyser seuls  leurs propres pratiques professionnelles ; permettre aux formateurs de choisir et développer leurs propres démarches d’APP dans le cadre de la formation des étudiants,
  • Les conditions de participation des formateurs à cette formation : volontariat, assiduité et s’engager à « faire » de l’APP avec les étudiants,
  • La constitution du groupe de formateurs : une quinzaine de participants,
  • Le calendrier envisageable : le nombre et la répartition des séances sur l’année (civile, à cause de la budgétisation),
  • Les modalités organisationnelles : les horaires, la salle et son organisation, les convocations, les attestations de présences, etc.,
  • Des principes et modalités andragogiques : formation-action, congruence entre les pratiques avec les formateurs et celles avec les étudiants, implication et interactivité, production d’écrits, régulations, bilans, etc.,
  • Le financement : les vacations et frais pour l’intervenant,
  • La convention entre le CHU et l’intervenant,
  • La mise en place de l’APP dans la formation et premières limites,
  • La place « administrative »[16] de l’APP dans le temps de travail des formateurs,
  • Etc.

À partir de là, une esquisse de projet de formation a été élaborée avec la coordinatrice (cf. annexe 1) qui a déposé une demande de formation auprès de la Direction de l’IFSI ; celle-ci a accepté de l’inscrire dans le cadre de la formation continue de formateurs, financée par le CHU local avec signature d’une convention[17] établie entre la Direction du CHU et moi-même. Ainsi ont été programmées trois demi-journées fin 2014 et six demi-journées plus une journée entière en 2015, à raison de quatre heures par demi-journée.

Il est à noter que, suite à la première rencontre, ces « formateurs APP[18] » se sont réunis entre eux à deux reprises, fin juillet et fin août, avec comme ordre du jour :

  • Réfléchir à l’appellation des ateliers (APR ou APP ?),
  • Clarifier et rédiger les objectifs des séances pour une cohérence en méta-analyse,
  • Rédiger une charte des « formateurs APP » qui devrait être signée par les volontaires,
  • Élaborer un guide permettant de repérer la multidimensionnalité des situations exposées,
  • Élaborer un guide pour l’animation et la coanimation des ateliers,
  • Élaborer un calendrier des séances en fonction des semestres et des années de formation des étudiants.

À partir de toutes ces données, restait donc à mettre en œuvre[19] cette supervision, la première séance étant programmée pour le 30 septembre 2014.

4. Mise en œuvre de la supervision

Nous voilà donc engagés contractuellement avec l’équivalent de huit demi-journées entre septembre 2014 et décembre 2015 pour ce qui sera nommé supervision par les formateurs. Je préciserai ici que je ne me situe pas dans le genre[20] de supervisions de type clinique[21] souvent à dominante dite « psy », n’ayant pas moi-même les compétences attendues d’un superviseur (« super-viseur »[22] ?) et surtout ne visant pas les objectifs de ces dispositifs en posture d’analyste analysant les pratiques des autres à leur place. Je ne dénigre absolument pas ce genre de supervision (appelé parfois supravision), mais celle que je développe ici et que je préfère nommer « accompagnement professionnel » afin d’éviter toute connotation avec le genre ci-dessus évoqué, consiste en une formation de formateurs/animateurs développant eux-mêmes des modalités d’APP. C’est une démarche de professionnalisation qui se décline sous forme de formation-action en particulier avec des pratiques congruentes avec celles que peuvent ou pourraient développer ces formateurs/animateurs auprès des étudiants, et ce dans l’esprit d’un « laboratoire expérimental » où l’on peut s’essayer, expérimenter, avancer par essais-erreurs… D’ailleurs ces formateurs se considèrent comme des chercheurs dans ce « labo[23] » avec un cadre, un garant et des animateurs pouvant s’autoriser à (faire) expérimenter des formes variées d’analyse de pratiques (genres et styles) qui pourraient être ensuite mises en œuvre auprès des étudiants.

4.1 Démarrage de cette supervision : la première séance fin septembre

Il s’agit de la première demi-journée de formation avec le groupe dans une salle dédiée. Ayant déjà rencontré ces formateurs en juin nous n’avons pas procédé aux rituelles présentations de démarrage ; dans un premier temps, j’ai rappelé quels étaient les objectifs de cette formation (les principaux : développer pour les formateurs le savoir analyser en tant que métacompétence professionnelle [Ferry, 1983] et le savoir animer des groupes d’APP, pouvoir développer et améliorer l’APP pour les étudiants), ainsi que ses principes (évoqués dans le point 3 et développés en 4.4.2) et son calendrier. Je les ai invités à s’inscrire dans une démarche de coopération et de « cré-action » en s’inspirant du précepte de Balint (1960) pour s’autoriser à « avoir le courage de sa propre bêtise », puis nous avons rapidement élaboré ensemble un ordre du jour :

  • Établir des règles de fonctionnement pour ce groupe :
  • Elles ont concerné notamment l’assiduité, la confidentialité concernant les analyses à venir, la prise de notes pour l’élaboration coopérative de « traces » de nos travaux, la convivialité (collations pour l’accueil et les pauses),
  • Réfléchir à la mise au point de la charte travaillée lors des deux rencontres de l’été :
    • L’objectif de cette charte étant de contractualiser et garantir l’engagement de chaque « formateur APP » à participer à la supervision et d’assurer de l’APP avec/pour les étudiants,
    • Elle a aussi une valeur de reconnaissance et de prise en compte de ces activités dans les obligations institutionnelles des formateurs,
  • Préciser le vocabulaire/lexique qui sera le nôtre : analyse, méta-analyse, finalités, objectifs, courants de l’APP, théories de référence, situation versus pratique, dispositifs, ateliers, séances, modalités dont le GFAPP, protocoles, cadre, techniques, outils, co-intervention versus co-animation, etc :
    • J’ai été amené à apporter ou compléter de manière synthétique de l’information relative à tous ces termes afin de tendre vers un langage commun dans le groupe,
    • En complément à ces clarifications, j’ai fourni quelques éléments bibliographiques de base et suggéré des textes sur mon site[24] personnel tout en précisant que nous aurions l’occasion de revenir sur certains points tout au long de la formation,
    • J’ai invité les formateurs à mutualiser les informations et références qu’ils avaient à ces sujets, et réfléchir à une banque numérique de données du groupe,
  • Relever les questions en suspens :
    • Recueil de celles auxquelles une réponse pourrait être apportée sur le champ ou qui renvoient à un traitement lors de prochaines rencontres,
  • Partager un retour sur la globalité de cette première séance de formation :
    • Cette démarche sous forme de métacommunication[25] (Perrenoud, 1994) porte à la fois sur le fond la forme de la journée permettant entre autres d’exprimer des ressentis, des besoins, des attentes et d’anticiper, penser la rencontre suivante,
    • À l’issue de ce temps, j’ai fourni mon adresse électronique ouvrant ainsi la possibilité de me contacter entre nos rencontres dont la date de la prochaine est rappelée.

Un compte rendu de cette demi-journée a été établi par deux participants et remis ultérieurement à tous.

Cette première séance a permis de commencer « à faire groupe » en particulier par l’appropriation de règles de fonctionnement et par la réflexion autour de la charte permettant d’affiner ce que pourrait être l’identité professionnelle de chaque « formateur APP » ainsi que l’identité institutionnelle de ce « groupe APP » au sein de l’IFSI. Elle a également permis de nombreuses clarifications et appropriations de divers aspects liés à l’APP, ce qui a aussi contribué au sentiment d’appartenance à ce groupe partageant un même langage avec ses signifiants et ses signifiés. Et il n’est pas interdit de penser que tout cela a encouragé un début d’harmonisation des pratiques d’APP auprès des étudiants.

4.2 La deuxième séance début novembre  

À la demande des formateurs l’ordre du jour fut le suivant :

  • Finalisation et signatures de la charte :
    • Il est décidé de conserver l’appellation APP et après quelques retouches de détail chacun est invité à signer la charte. (Annexe 2),
    • Il est précisé qu’elle sera réexaminée chaque année,
  • Retour échanges sur les APP réalisées avec les étudiants depuis la première séance de supervision. (l’appellation APR a été abandonnée au profit de APP) :
    • Chacun est invité à identifier un facteur d’efficience et un facteur questionnant de ces ateliers. Ceci a permis de partager autour de nombreux aspects de l’APP : les objectifs de ces séances, le cadre de l’APP, l’élaboration des règles de fonctionnement (avec les étudiants ou pas), tour de table ou pas pour proposer une situation, la modalité de choix de la situation qui sera exposée, place de la parole, de l’écoute, des émotions, donner un thème ou pas pour les situations, la compréhension du sens des APP par les étudiants qui sont obligés d’assister à ces ateliers, le volontariat de participation à l’analyse, l’intérêt de la multiréférentialité[26], la méta-analyse en fin de protocole (quels objectifs et contenus), etc,
    • Des pistes d’actions ou de changement sont évoquées, mais aucune consigne particulière n’est donnée pour les futurs ateliers étudiants. Il reviendra à chaque formateur, à chaque binôme d’animateurs de se positionner à la lumière de ces échanges,
  • Réflexion sur la coanimation :
    • Elle a occupé une place importante ce jour-là. Après le constat partagé de son intérêt pour les formateurs et les étudiants, plusieurs témoignages ont permis de réfléchir autour d’aspects saillants : la constitution puis la permanence ou non du binôme avec le même groupe, les trois temps pour ces ateliers (la préparation, l’animation, le débriefing des deux formateurs après chaque séance), la définition et la complexité de la coanimation, les types de coanimation, les places et rôles de chacun dans le binôme, la posture du formateur dans l’APP, etc,
    • Une longue série de questions a été notée dans le compte rendu de la séance ; elles pourront être reprises dans la suite de la formation,
  • Réflexion autour de la multidimensionnalité :
    • Quelle différence et quels liens entre multidimensionnalité et multiréférentialité[27] ?
    • Quand la repérer ? Dans l’exposé, les questions, les hypothèses, la conclusion de l’exposant ?
    • L’intérêt de repérer par une écoute active les différentes dimensions dans l’exposé est souligné pour accompagner le questionnement et l’émission d’hypothèses au service de l’exposant en premier,
    • Il paraît alors intéressant d’élaborer un (des) outil(s) pour son repérage,
  • Retour sur cette demi-journée.

Un compte rendu de cette demi-journée a été établi par deux participants et remis ultérieurement à tous.

Cette deuxième demi-journée a continué à signifier l’appartenance à ce « groupe APP » par la signature de la charte, acte symbolique, mais aussi par la réflexion engagée sur les pratiques de ces formateurs auprès des étudiants en APP. Les retours, échanges, témoignages sur les ateliers avec les étudiants, sur les coanimations ont permis à certains de découvrir les pratiques, questionnements, réflexions, doutes, parfois embarras de leurs pairs ce qui a été souligné en fin de rencontre comme rassurant.

Cette séance a également permis de s’intéresser de manière concrète, en lien avec le vécu des ateliers auprès des étudiants, à la multidimensionnalité et à son intérêt pour l’analyse, cette notion et son emploi étant relativement nouveaux pour la plupart de ces formateurs. À noter que dans le référentiel de 2009, on ne trouve qu’une seule occurrence à ce sujet, « La situation de santé est analysée de manière multidimensionnelle », et aucune quant à la multiréférentialité.

À l’issue de ce deuxième temps de formation plutôt axé à la demande du groupe sur l’échange et la réflexion où nous avons « parlé d’APP », j’ai eu le sentiment que la machine était lancée et que le « labo » pouvait être mis en œuvre dès la rencontre suivante. Et j’ai annoncé cela à la fin en disant que la prochaine fois nous vivrions ensemble une analyse de pratique à partir d’une situation apportée volontairement par l’un d’eux et donc que nous « ferions de l’APP ».

4.3 La troisième séance mi-décembre

4.3.1 Un retour-bilan sur l’APP étudiants en fin de trimestre

J’avais envisagé d’animer le premier GFAPP avec ce groupe juste après le Quoi de neuf ?[28] qui deviendra rituel. Mais les formateurs ont éprouvé le besoin de partager, avant le GFAPP, un retour-bilan sur leurs récentes APP réalisées avec les étudiants, ce que nous avons fait. Il a alors été question de la coanimation et de sa préparation, de l’importance du choix du lieu, de la posture et du rôle du formateur-animateur, de l’intérêt du Quoi de neuf ? avec les étudiants, des règles de fonctionnement de ces APP, des consignes pour faire émerger des propositions de situations, des modalités de choix des situations… Échanges très riches lors de ce retour qui, évidemment, a vu naître de nouvelles questions. La spirale fonctionne !

4.3.2 Le premier GFAPP dans le groupe

Après une courte pause, j’ai démarré le GFAPP. Après avoir identifié deux observatrices (une pour l’animation – qui commençait à cet instant même, une pour le repérage de la multidimensionnalité), et distribué la dernière version de la « grille des phases », la version qu’ils avaient étant plus ancienne[29], j’ai posé le cadre et l’analyse a eu lieu, animée par mes soins. Je n’en décrirai pas le déroulé ici, me contentant de fournir des points qui ont été abordés au moment de la méta-analyse dans la dernière phase du protocole. Ainsi nous avons partagé nos réflexions sur : le repérage et l’emploi de la multidimensionnalité dans les quatre temps de l’analyse de la situation[30] ; la coanimation (la situation exposée portait sur la coanimation d’une APP avec les étudiants) ; ce que peut faire la personne (ici la coanimatrice) également présente dans la situation évoquée et participant à l’analyse ; de pouvoir « reparler » de la situation après la séance entre les formateurs présents à cette séance  avec possibilité ou non de donner des pistes, voire des conseils à l’exposant ; la participation ou non des observatrices à l’analyse ; la place de la pause dans le protocole pour ne pas casser la dynamique de l’analyse ; la prise en compte de l’exposant en tant que sujet acteur dans la situation exposée qui est une reconstruction de la réalité ; le fait que l’on est tourné sur des questions plutôt que sur la recherche de réponses/solutions ; de l’animateur investi d’un pouvoir symbolique dans le groupe et garant du cadre mis en place ; de la «  solennité » de la démarche qui assure la sécurité et prévient la prise de risque, etc.[31]

Après cette méta-analyse spiralaire, si je puis dire, qui aurait pu durer plus longtemps si le temps restant l’avait permis, un moment de métacommunication sur la demi-journée a permis de partager de la satisfaction, le constat de la qualité d’écoute et du fait que « l’on s’est sentis en sécurité pour s’exprimer », une envie de creuser davantage et des remerciements mutuels.

Avant de se séparer, j’ai rappelé la date de la prochaine rencontre et demandé deux volontaires pour coanimer l’analyse la prochaine fois en précisant que je restais à leur écoute durant l’intersession s’ils souhaitaient un accompagnement à la préparation de leur coanimation.

À l’issue de cette troisième rencontre, j’ai eu le sentiment que les dynamiques de groupe, de partage, de coopération et de réflexion étaient bien enclenchées, qu’une confiance mutuelle prenait corps et que les participants s’autorisaient à une « parole vraie » permettant peut-être à chacun de prendre conscience que « la rencontre avec autrui permet une rencontre avec soi dans le langage » (De La Monneraye, 1999). En même temps je réalisais l’ampleur du chantier que nous avions ouvert quant à l’APP et me demandais si les huit rencontres restantes permettraient de tout approfondir, certain par expérience que plus nous avancerions, de nouvelles questions, de nouvelles problématiques surgiraient et que d’autres thèmes à « forer » comme disent les Québécois verraient le jour.

4.4 Schéma directeur des séances suivantes.

4.4.1 La trame générale

Les séances suivantes, basées sur le principe du « labo », se dérouleront majoritairement sur la trame suivante qui pourra évoluer selon les besoins et si la nécessité se fait sentir en fonction de demandes et propositions du groupe :

  • Accueil rapide avant de commencer avec petite collation,
  • « Quoi de neuf ? » depuis la dernière rencontre,
  • Analyse d’une pratique à partir d’une situation vécue (de préférence liée à de l’APP avec les étudiants) et exposée par un formateur volontaire :
    • La modalité préférentielle utilisée sera le GFAPP puisque majoritairement employée par les formateurs avec les étudiants. Elle sera déployée dans l’esprit du « labo » avec des styles divers suivant les (co) animateurs, mais la possibilité est aussi proposée de faire vivre toute autre modalité que le GFAPP sollicitée ou initiée par un participant,
    • À partir de la deuxième ou troisième séance, l’animation[32] ou la coanimation sera proposée à des volontaires avec liberté de mise en œuvre soit pour renforcer une façon de faire soit pour en expérimenter une nouvelle,
  • Courte pause « physiologique » et conviviale avec petites collations[33],
  • Méta-analyse[34] liée au vécu de cette séance d’analyse sans revenir sur la situation et la pratique évoquées :
  • Les contenus abordés dans cette phase varieront au fur et à mesure de la progression et de l’intérêt du groupe,
  • Il pourra être question a minima du savoir analyser et du savoir (co) animer, mais aussi des savoirs questionner, émettre et formuler des hypothèses, être en écoute active, repérer et utiliser la multidimensionnalité, la modalité de choix de la situation, la prise en compte des émotions, etc. D’autres thématiques pourront être mises en réflexion à ce moment-là en fonction des intérêts et de la progression du groupe pouvant conduire à des apports de documents et/ou d’informations en intersessions et/ou à une communication lors d’une séance suivante,
  • À noter que lors de ce temps « institué et instituant »[35] les participants ont la possibilité de proposer d’autres règles de fonctionnement dans la quête de plus d’efficience, règles qui pourront être mises à l’épreuve des faits et méta-analysées lors de séances suivantes,
  • Retour sous forme de métacommunication sur l’ensemble de la demi-journée puis projection sur la prochaine rencontre avec rappel de sa date.

À noter que quelques rencontres se dérouleront différemment, sans temps d’analyse, mais axées autour de réflexions et d’échanges sur une ou deux thématiques choisies par le groupe, et/ou pour mener des régulations sous forme de « bilans – projections ».

4.4.2 Quelques principes pour cette supervision

Nous fonctionnons avec quelques principes tant pour le déroulement global des rencontres que pour les moments dédiés à l’analyse proprement dite. Ainsi :

  • Des principes que l’on pourrait qualifier d’éthiques, ceux liés au cadre du GFAPP dont certains s’appliquent aussi à la démarche de la supervision : Confidentialité, Respect mutuel, Bienveillance sans complaisance[36], Neutralité, Volontariat, Assiduité, Suspension du jugement, Non conseil, Co-responsabilité, Groupe au service de l’exposant,
  • Des principes organisationnels :
    • La salle : son emplacement (le plus neutre et si possible loin des bureaux[37]), son organisation spatiale en rond[38] avec chaises tables permettant de prendre des notes,
    • De petites collations sur les tables pour lutter contre la fatigue, voire l’hypoglycémie,
    • Le respect des horaires,
    • Des observateurs : Pour le temps de l’APP proprement dit, des observations[39] participantes seront mises en œuvre sur le principe du volontariat avec retours pour démarrer les méta-analyses. Elles pourront selon l’intérêt et les besoins du groupe, porter sur divers aspects de la démarche : la (co) animation, le protocole lui-même, le questionnement, l’émission d’hypothèses, la multidimensionnalité, la multiréférentialité en référence à Ardoino (1986), etc,
    • Un secrétariat tournant : m’inspirant du titre et de la démarche des revues « Traces de faires » initiées par Jacques Pain[40], j’ai proposé qu’un compte rendu de chaque rencontre (sans trace de la situation analysée) soit établi dans les jours suivants, à tour de rôle par deux formateurs (secrétaires) volontaires, puis remis à chaque participant et versé dans une banque numérique dédiée à l’APP, consultable par l’ensemble des formateurs de l’institut. Cet archivage étant pensé comme utile pour la mémoire du groupe, pour les absents de la rencontre et pour l’information, la mutualisation pour/avec d’autres formateurs de l’institut,
  • Un principe d’accompagnement en intersessions : Outre les contacts organisationnels entre les rencontres avec la (les) personne(s) coordonnant le groupe, j’ai proposé à tous, dès le départ, la possibilité de me contacter en intersessions pour toute demande d’information, d’aide, d’accompagnement quant à la mise en œuvre des séances d’APP avec les étudiants ou avec le groupe.
4.5 Des séances particulières 

Comme déjà évoqué, au cours de ces sept années d’accompagnement, il y eut quelques séances particulières induites par des besoins ou demandes durant lesquelles il n’y eut pas de temps d’APP proprement dite, mais bien sûr en relation avec. 

4.5.1 Les séances-réflexion autour de thèmes

Il en fut ainsi lorsque le groupe éprouva le besoin de prendre plus de temps que lors des moments dédiés aux méta-analyses pour faire le point sur certains aspects pratiques et/ou théoriques liés au développement de l’APP tant au niveau du groupe qu’avec les étudiants. Ces réflexions pouvaient être accompagnées d’apports de l’un d’entre nous.

4.5.2 Une conférence-débat pour l’ensemble des formateurs de l’IFSI

Au mois de mars 2017, je fus invité à présenter l’APP à l’ensemble de tous les formateurs de l’IFSI, en présence du Directeur. Cette demande de la Direction venait du fait que ce groupe supervisé et les APP avec les étudiants étaient perçus d’une façon particulière par une partie (l’ensemble ?) des autres formateurs de l’institut ; une tension était, me semble-t-il, perceptible. L’objectif souhaité de cette séance était de clarifier, préciser, démystifier ce qu’était et à quoi pouvait servir l’APP au sein de la formation des étudiants, de corriger de fausses représentations et de (mieux) faire connaître, voire reconnaître la qualité de la démarche des « formateurs APP » ainsi que l’intérêt que représentait la supervision en termes d’accompagnement et de formation professionnelle.

Après un exposé interactif appuyé sur un diaporama présentant un panorama de l’APP, dont les objectifs qu’elle pouvait permettre d’atteindre, j’ai invité des volontaires formateurs du groupe à dire ce que leur apportait la supervision, mais surtout les effets qu’ils percevaient chez les étudiants qui bénéficiaient de l’APP au cours de leurs trois années de formation.

Une métacommunication finale sur cette rencontre a laissé percevoir quelques changements de regards sur l’APP et sur ce groupe ouvert, coopératif, professionnellement impliqué et n’ayant rien d’une « secte » ou d’un « groupe de psychanalyse ». Invitation à venir assister à une séance d’APP avec les étudiants ou avec le groupe a été alors adressée aux autres formateurs qui le souhaiteraient. 

4.5.3 Une séance avec intervenants extérieurs

À l’automne 2018, une séance particulière a eu lieu suite à une analyse menée dans le groupe qui souleva bien des questions. Il s’agissait de l’analyse de la coanimation par un binôme de formateurs d’une APP avec des étudiants au cours de laquelle un étudiant exposa un vécu de stage où il avait été témoin de l’attitude d’un professionnel « renommé » pouvant être, semblait-il, répréhensible aux yeux de la Loi alors qu’il n’y eut aucune réaction des autres professionnels témoins de la chose. Situation fort délicate qui mettait en question, voire peut-être en cause certes ce professionnel, mais également le tuteur de stage de l’étudiant, la référente de stage, les autres témoins silencieux, mais aussi le binôme de formateurs APP et le groupe d’étudiants informés de cet acte relevant possiblement de la justice (c’était une hypothèse), mais aussi notre groupe de supervision dont moi désormais au courant, mais aussi l’institut et sa Direction ainsi que l’établissement où se déroulait le stage, etc. Tout ceci en prenant en compte le fait que l’étudiant apparemment en souffrance et qui avait accepté d’évoquer, de déposer, cette situation dans le cadre de la confidentialité de l’APP, ne voulait pas faire un signalement de peur de ne pas être validé en fin de formation… Les droits et devoirs de chacun, l’éthique, le secret professionnel, le secret partagé, la confidentialité, la souffrance professionnelle, l’accompagnement étaient au cœur de la réflexion.

Ce cas d’école, si je puis dire, au-delà des questions soulevées et restées avec des pistes de réponses approximatives, voire sans réponses sur le champ, souleva des cas de conscience en tant que professionnels, mais aussi citoyens, et après réflexions et échanges à la suite de cette APP du groupe en supervision, il a été décidé de demander au service juridique du CHU si un (des) juriste(s) pourraient venir rencontrer le groupe pour lui apporter leurs lumières. Ce qui fut fait et permit aux formateurs de savoir comment agir dans le cadre de cette situation, mais aussi de situations pouvant éventuellement advenir tout en confirmant que « Savoir analyser, c’est se mettre en mesure de déterminer les apprentissages à faire dans telle ou telle occurrence. Ce n’est pas exactement « apprendre à apprendre », c’est apprendre à repérer ce qu’il convient d’apprendre.» (Ferry, 1983).

4.5.4 Les séances en distanciel

Compte tenu de l’impossibilité de se rencontrer en présentiel à cause de la situation sanitaire liée au Coronavirus et du souhait de ce groupe de pouvoir cependant poursuivre la supervision, deux séances de quatre heures ont eu lieu, comme on dit, « en visio ».

4.5.4.1 Une séance de réflexion à distance en novembre 2020 sur des aspects questionnant

J’avais proposé de mener une APP à distance dès la première de ces deux séances, mais les formateurs, que j’ai perçus réticents quant à cette pratique[41], ont préféré que nous menions une réflexion sur plusieurs points autour de l’APP qui les questionnaient à ce moment-là. Cette séance fut animée par les deux coordonnateurs du groupe actuels sous forme de discussion régulée après avoir établi collectivement un ordre du jour et invité à « cliquer sur la main » pour demander la parole. Ainsi, il fut question de l’intérêt et de la mise en œuvre du Quoi de neuf ? avec les étudiants, de la phase d’émergence de situations à analyser en lien avec la modalité de choix maintenant préférentiellement adoptée par les formateurs (la co-délibération entre les volontaires pour exposer), des situations proposées et non analysées dans la séance avec possibilité d’utiliser ultérieurement la technique des Trois colonnes[42] (Robo, 2018), du recrutement de nouveaux membres dans cette équipe de « formateurs APP » et en corollaire de l’actualisation de la charte.

Lors de la métacommunication sur cette première séance à distance, outre l’intérêt signifié des échanges, il a été souligné l’apprivoisement progressif du distanciel (« C’était mieux vers la fin qu’au début. »), l’importance de prévoir des règles de fonctionnement dès le début de cette activité et la difficulté liée au fait qu’une partie des participants étaient dans leurs bureaux ou chez eux seuls devant leurs webcaméras et que l’autre partie était regroupée dans une salle de l’institut avec une seule caméra fixe munie d’un micro.

4.5.4.2 La première APP à distance du groupe en février 2021

Les formateurs ont accepté « d’essayer » de vivre une « APP distancielle » lors de la deuxième rencontre qui ne pouvait avoir lieu en présentiel, ce qui pour eux était une première. Le schéma de la séance fut le même que celui de celles en présentiel. Comme attendu par les deux coordonnateurs, je m’apprêtais à animer toute cette séance, mais une formatrice s’est spontanément proposée dès le début pour animer le Quoi de neuf ? puis le temps d’APP avec la modalité GFAPP, intéressée de pouvoir vivre cette expérience en « labo » en me laissant animer la méta-analyse et la métacommunication de fin de rencontre. Ce qui fut ainsi vécu.

Après le Quoi de neuf ? elle fit procéder à l’élaboration collective de règles spécifiques au déroulement en distanciel (une quinzaine) puis démarra le GFAPP (qui s’est bien déroulé) avec son style personnel d’animation après la désignation d’une observatrice de son animation.

La méta-analyse a porté majoritairement sur l’animation de l’APP à distance, sur l’importance des règles co-élaborées, sur l’intérêt d’avoir un responsable de la distribution de la parole à partir des « mains cliquées ». Il a été émis l’hypothèse que cette expérience a été très positive, certes grâce à la qualité de l’animation et du cadre mis en place, mais surtout du fait que la majorité des membres du groupe avait une longue expérience de l’APP dans la supervision. À la suite de ce temps, les formateurs ont souhaité un moment de réflexion sur la coanimation des APP avec ou par des étudiants en troisième année.

La métacommunication à la fin de cette séance qui a duré quatre heures avec une pause d’une dizaine de minutes, a laissé apparaître une satisfaction unanime avec cette remarque intéressante : « le distanciel nous a rapprochés ! » et le souhait de pouvoir mener d’autres APP distancielles si le présentiel était encore impossible à l’avenir.

5. Focales sur certains objets de travail-réflexion dans et à partir des APP

Je ne décrirai pas ici chacune de la quarantaine d’APP réalisées avec ces formateurs entre 2015 et aujourd’hui ; je porterai seulement la focale sur quelques aspects saillants apparus lors de ces rencontres et sources de réflexion-formation-production.

5.1 Des thématiques de situations, objets d’analyses

Dans une recherche de congruence, les situations analysées lors les séances en supervision devaient préférentiellement être liées aux APP animées par ces formateurs auprès des étudiants. Au fil du cheminement, les situations exposées dans le groupe ont conduit à des analyses liées à des thématiques variées où, au-delà d’aspects contextuels, c’était le professionnel, sujet-acteur qui occupait le cœur de la réflexion et de la réflexivité partagées. Ces situations ont, par exemple et sans exhaustivité, porté sur :

  • La gestion d’un participant provocateur en APP,
  • Un étudiant exposant de manière « lyrique » la situation dans laquelle il a été confronté à la mort d’un patient,
  • Une coanimation loupée à cause de la mésentente entre les deux formatrices,
  • Les écueils rencontrés lors d’une APP avec un formateur de terrain dans un service hospitalier,
  • Une séance difficile mettant en difficulté un animateur culpabilisant de ne pas s’en sortir dans son animation et où le co-animateur n’intervenait pas,
  • La difficulté à animer une APP dans laquelle s’installe le silence avec un groupe d’étudiants non motivés,
  • Le mal-être devant le temps très long mis par le co-animateur pour poser le cadre de l’APP, et sans s’autoriser à intervenir,
  • Garantir la sécurité du groupe d’étudiants quand la coanimation dysfonctionne,
  • Une coanimation réussie avec un formateur de terrain dans un service,
  • Une séance d’APP interrompue avec un groupe d’étudiants non volontaires et réfractaires,
  • La difficulté à prendre sa place dans une coanimation non préparée, devant un groupe d’étudiants jamais rencontré auparavant,
  • La légitimité à développer de l’APP renforcée dans son animation grâce à un groupe d’étudiants devenus performants dans l’analyse,
  • Conserver la relation de confiance dans le groupe d’étudiants et être garant du principe de confidentialité,
  • La gestion de sa charge émotionnelle en animant face à la souffrance exprimée par un participant,
  • Le choix par vote du groupe d’étudiants d’une situation très délicate évoquant le harcèlement ressenti par une étudiante en stage,
  • La gestion d’une situation dont un étudiant a été témoin pouvant mettre en cause un professionnel renommé,
  • L’angoisse quand le silence s’installe qu’il n’y ait pas de volontaire pour exposer une situation,
  • La réussite d’une première coanimation avec un étudiant de troisième année,
  • Se sentir démuni dans sa pratique d’animateur d’un groupe d’APP,
  • Perte de sa disponibilité dans l’animation quand son esprit est « vampirisé » par les faits institutionnels rapportés,
  • Accompagner dans l’analyse une étudiante qui reste sur son quant-à-soi,
  • Face à une évidence, impossibilité pour l’animateur d’intervenir dans l’analyse par crainte de bloquer le cheminement de cette analyse,
  • Animer et participer avec bienveillance sans complaisance à l’analyse d’une situation avec évocation douloureuse d’un ressenti de harcèlement sexuel en stage.

Bien que soit annoncée la possibilité d’exposer des situations vécues positivement, voire dites « réussies », comme c’est le cas dans tous les groupes que j’ai rencontrés on constate que les participants choisissent majoritairement des vécus professionnels que l’on peut qualifier de délicats, de difficiles voire de douloureux. Peut-on alors émettre l’hypothèse que cela est dû au fait que dans les organismes, les institutions, les établissements… les APP quand elles existent sont le seul lieu où professionnellement et en toute sécurité, en toute confiance, en toute authenticité, on peut s’autoriser à évoquer ses interrogations, ses difficultés, ses errances, ses doutes jusqu’à son mal-être au travail. Il est aussi possible de penser que ce choix est lié au fait qu’il paraît plus évident de travailler sur une situation difficile alors qu’il semble spontanément inutile de le faire sur ce qu’on estime avoir réussi.

5.2 Des objets de travail-réflexion

Tout au long de cette supervision et dans ce que je nomme la spirale de l’APP de nombreux aspects relatifs à l’APP ont été abordés, certains rapidement traités, d’autres mis en chantier dans la durée. En oubliant certains d’entre eux, je citerai ici, sans ordre chronologique ni degré d’importance :

  • Comment présenter l’APP aux étudiants ?
  • Comment démarrer l’APP avec les étudiants obligés d’assister aux temps d’APP ?
  • Le cadre de l’APP (ses constituants ; comment le poser puis le faire tenir, le faire évoluer),
  • Forme, objectifs et contenus des méta-analyses,
  • Évolutions des coanimations annoncées d’une séance sur l’autre avec : préparation en amont, types de coanimations, débriefing, postures, constitution des binômes, etc,
  • Les compétences pour animer, développer de l’APP,
  • Types, émergence de situations à exposer et modalité de choix,
  • L’art du questionnement et des types de questions,
  • L’aspect rituélique et l’importance des rituels,
  • La gestion du temps des rencontres, des phases de l’APP,
  • L’exposé oral et/ou écrit avant de venir,
  • La parole, sa place, sa régulation,
  • La prise en compte (et non la gestion) des émotions dans le groupe,
  • Les consignes (émergence, choix, exposé, etc.),
  • La coresponsabilité du / dans le groupe,
  • Les signes pour demander la parole, pour faire préciser, reformuler, éventuellement pour faire interrompre l’APP,
  • Le non-conseil et les conseils « déguisés »,
  • La suspension du jugement avec cette question « C’est quoi un jugement ? »,
  • La neutralité non verbale,
  • L’écoute active,
  • La multidimensionnalité vs multiréférentialité,
  • Le moment et la gestion de la pause,
  • La gestion des retardataires,
  • Le retour vers l’exposant après le temps de l’analyse,
  • L’utilisation du Trois colonnes avec des étudiants,
  • Les situations critiques et secret professionnel vs secret partagé vs confidentialité,
  • L’éthique professionnelle,
  • La sémantique de l’APP,
  • L’APP dans le projet pédagogique de l’IFSI et dans le cursus de la formation des étudiants,
5.3 Des outils fournis ou co-élaborés

Dès le début de cette supervision, j’ai proposé aux formateurs de se doter d’outils[43] au service de l’analyse, de l’animation, de leur formation personnelle et de leurs pratiques avec les étudiants et/ou en supervision. Je leur ai présenté cela[44] comme un étayage inspiré de la théorie du scaffolding learning – l’apprentissage de l’échafaudage[45] (Bruner, 2003) en vue d’un désétayage progressif lié à leur cheminement selon l’approche de Meirieu (2004) se nourrissant, comme Bruner des travaux de Vygotsky (1935).

Ainsi, tout au long de ce parcours, des outils ont été fournis par mes soins, et/ou co-élaborés par le groupe, puis mis à l’épreuve des faits et souvent modifiés toujours dans une quête d’efficience. Ils ont été chaque fois source de réflexion théorico-pratique ; certains ont pu être utilisés dans les séances de supervision, d’autres l’ont été avec les étudiants ; quelques-uns ont été progressivement abandonnés soit parce qu’ils étaient jugés comme inefficients, soit que les compétences acquises permettaient aux formateurs de ne plus s’en servir.

Tous appartiennent maintenant au groupe et à chacun qui a la liberté de les utiliser en les apprivoisant, en les faisant évoluer ou non.

5.3.1 Les outils fournis

À titre, d’étayage, de supports, d’exemples pouvant produire le fameux « effet yaourt[46] » (Clanché, 1988), et quand l’occasion s’est présentée, j’ai fourni la grille des phases du GFAPP, divers outils pour le repérage de la multidimensionnalité puis de la multiréférentialité (tableaux, cibles, listes, cartes mentales), l’outil Trois colonnes, une grille pour développer une écoute active, un exemple de « fiche-guide »[47] de préparation d’une coanimation, des synopsis de présentation de l’APP…

5.3.2 Les outils co-élaborés

Le groupe s’est approprié ces outils fournis en les faisant évoluer, parfois lors de méta-analyses, mais le plus souvent entre les rencontres, et de la même manière il en a élaboré de nouveau tels que : un outil pour développer l’art du questionnement ; un pour favoriser l’émission d’hypothèses de compréhension ; un au service des débriefings post ateliers ; un outil d’aide à l’animation d’une première séance d’APP pour les aides-soignants (dont le référentiel de formation est différent de celui des IDE[48]), ainsi qu’un outil d’aide à l’animation d’une séance d’APP en binôme avec un étudiant de troisième année ; un pour le suivi des groupes d’APP étudiants[49].

Il y eut deux façons de faire évoluer cette co-élaboration. La première consistant à ce que chaque formateur ou binôme élabore une nouvelle maquette de l’outil. La deuxième consistant à prendre la dernière version (x) de l’outil déjà élaboré et, après expérimentation et/ou discussion, produire la version x+1. Ainsi, par exemple, ils en sont arrivés à la version 16 de la « fiche de préparation de la coanimation ».

5.4 Des bilans indispensables

Tout au long de cette supervision, des bilans ont été réalisés par le groupe dans un souci de régulation et de projections sur les suites à donner soit parce qu’un besoin se faisait sentir à un moment donné, soit pour boucler une année de supervision accordée. Ils portaient sur le fond et la forme de cette dernière, sur le groupe (sa constitution, son fonctionnement, son évolution…), sur les acquis, mais aussi les manques et besoins encore existants, mais également sur le développement des APP auprès des étudiants. Ils ont nourri les rencontres programmées fin août, juste avant la rentrée des étudiants pour une nouvelle année de leur formation, et ont permis des projections tant sur les APP avec ces derniers que sur la supervision qui redémarrait.

Lors d’un de ces bilans de fin d’année, été 2019, le groupe, souhaitant poursuivre la supervision, s’est posé la question (en mon absence) de savoir s’ils voulaient le faire avec moi ou, pour changer de genre de supervision, faire appel à une psychologue. Le choix a été de continuer avec moi.

En sus de ces bilans propres au groupe, des bilans institutionnels, dont un en présence du Directeur, ont été réalisés à la fin de chaque année de supervision pour la Direction de l’IFSI et pour le service formation continue du CHU qui finançait cette formation continue, ces derniers étant renseignés individuellement par chaque formateur sur un imprimé spécifique fourni par ce service et intitulé « Fiche d’évaluation de formation par le stagiaire » ; je devais en principe recevoir une synthèse de ces évaluations.

6. Des effets de cette supervision

C’est en particulier lors d’échanges au cours des méta-analyses et des métacommunications que certains effets produits par cette formation-supervision étaient perceptibles. Mais, deux ans après le début de la supervision, fin 2016, le groupe s’interrogeant sur ce qu’elle pouvait engendrer a éprouvé le besoin d’en savoir plus. Il a décidé de s’organiser coopérativement pour recenser les effets produits en les catégorisant et en rédigeant ensuite des écrits à ce propos. À noter que ce besoin n’est pas réapparu les années suivantes, les faits corroborant les effets déjà identifiés. Les constats au bout de deux années de supervision ont été les suivants.

6.1 Effets sur les étudiants

Des retours écrits demandés aux étudiants ont montré un ressenti positif quant aux « ateliers d’APP » dès leur début après, pour la majorité d’entre eux, l’étonnement lié à la découverte de cette nouvelle démarche peu habituelle dans leur scolarité. Pratiquement tous se sont impliqués dans les APP comprenant très rapidement l’intérêt de l’utilisation de la multidimensionnalité puis de la multiréférentialité qu’ils mettaient en lien avec les enseignements de l’IFSI, avec ceux des stages et avec la partie du portfolio dédiée à l’analyse de situations par écrit, ainsi qu’avec la production du TFE (travail de fin d’études).

D’après leurs retours écrits, voici quelques effets que peut produire l’APP sur les étudiants : L’APP apprend l’ouverture à différents points de vue sur les situations et les pratiques ; elle permet la libération de la parole dans les séances qui sont « des lieux d’écoute » grâce au respect mutuel et à la confiance entre pairs ; elle favorise la prise de recul et la réflexivité dans les situations toujours complexes ce qui peut aider à anticiper des situations futures ; par le questionnement professionnel elle renforce notre posture et agit sur le développement de l’identité professionnelle ; l’APP permet de «  confronter notre vision soignante et humaine du métier » ; elle « fait du bien » en offrant la possibilité de « verbaliser ses sentiments, ses émotions et ses expériences en stage » sans risque d’être jugés ni par les pairs ni par les formateurs de l’APP ; elle apprend à douter par la confrontation des hypothèses de compréhension et à revisiter, réévaluer les pratiques, parfois en les repositionnant sur des normes institutionnelles ; « elle renforce la cohésion du groupe et sa synergie » et permet de « gagner en maturité par cet apprentissage de l’analyse et de l’expérience professionnelle ».

Un effet constaté récemment est lié à l’actualité sanitaire due au Coronavirus et à la suspension des cours en présentiel : l’APP permet de « se retrouver », de retrouver les formateurs du fait que les rares moments où les étudiants peuvent se retrouver ensemble sont lors des APP à l’issue des stages, regroupements autorisés dans l’IFSI, dans le respect des consignes en vigueur pour éviter la propagation du virus.

6.2 Effets sur les pratiques professionnelles des formateurs

Au bout de deux ans de cheminement, les formateurs du groupe ont aussi évoqué par écrit les effets suivants de l’APP et de la supervision sur leurs pratiques professionnelles.

L’APP entre formateurs permet de travailler sur et de développer la réflexivité, élément important du programme de formation des étudiants et du projet pédagogique de l’IFSI. En tant qu’espace d’écoute et de réflexion entre pairs sur des problématiques de travail, elle a un retentissement sur la qualité du suivi pédagogique des étudiants. Elle améliore la qualité du travail des formateurs ce qui est un point positif pour la formation proposée aux étudiants et elle est perçue comme un investissement sur le long terme par cette qualité et le questionnement qu’elle induit… C’est une « petite graine dont on percevra les fruits plus tard ». L’APP au sein du groupe a contribué à une montée en compétence d’analyse, de réflexion, d’animation et de questionnement.

Le cheminement en APP a également contribué à un travail sur soi par de l’autocritique, par une prise de distance quant à sa pratique, un travail sur ses émotions, sans parler des effets sur la confiance en soi, sur l’assurance dans la fonction de formateur tout en renforçant sa légitimité. Le travail sur les erreurs et les manques, sans jugement de la part des pairs, en permettant d’oser dire ses difficultés a contribué à une meilleure estime de soi et le fait d’avoir exposé une (des) situation(s) professionnelle(s) personnelle(s) dans le groupe est une aide pour la fonction auprès des étudiants dans l’animation des ateliers d’APP.

Le travail en binômes d’animation a permis de mieux connaître les collègues de travail, de mieux les comprendre et a généré des expériences de travail apprenantes ; il a développé, à l’instar du travail conduit en supervision, une approche pour ne pas dire un développement de l’éthique professionnelle en particulier au niveau des valeurs et du respect mutuel, et cela avant, pendant et après les séances d’APP.

Le travail en « équipe APP » a contribué à un véritable partage d’expériences entre formateurs (ce qui manquait cruellement semblait-il au sein de la grande équipe de l’établissement), a développé le sentiment d’appartenir à un groupe grâce à la bienveillance et à la large confiance dans ce qui se partage en son sein, grâce au respect de la parole de chacun et au soutien à la réflexion. Une recherche d’amélioration des pratiques de formation résulte de ce travail et de la supervision qui offrent aux formateurs un espace de rencontres, d’échanges et de création pédagogiques au sein d’un groupe dynamique et vivant. Par ailleurs des acquis de cette formation sont réutilisés en encadrement des étudiants sur le terrain, en suivi pédagogique et pour certains… dans le cercle familial.

6.3 Effets sur le groupe de formateurs APP

Au-delà des effets produits sur les formateurs, ceux-ci ont relevé également par écrit des effets produits sur le groupe lui-même.

Le groupe prend le temps de fonctionner dans et hors la supervision malgré les contraintes institutionnelles, ce qui témoigne de la motivation, de l’intérêt et de l’investissement des participants. Chaque rencontre lors de cette formation est un lieu d’apaisement de tensions rencontrées dans le travail et un moment où l’on peut se poser pour prendre le temps de réfléchir ensemble à partir de nos pratiques ce qui contribue à une augmentation des compétences collectives surtout en analyse.

Le fonctionnement en « laboratoire de recherche » contribue au développement de l’intelligence collective qui « aboutit à une mobilisation effective des compétences » (Lévy, 1994) et favorise la liberté au niveau de la création collective d’outils et de styles d’animation de l’APP qui sont testés entre formateurs avant de les utiliser en APP avec les étudiants.

Le sentiment d’appartenance à ce groupe, « espace de convivialité où l’on se sent en sécurité », qui s’est progressivement installé a favorisé une harmonisation (et non uniformisation) rassurante des démarches d’APP dans l’IFSI et l’IFAS tout en créant une cohésion et un meilleur fonctionnement des binômes face aux étudiants.

La supervision et la perception de manque de (re) connaissance de l’APP par d’autres formateurs de l’institut a motivé l’intention du groupe de faire connaître et de mettre à disposition de l’ensemble des formateurs, dans l’espace numérique dédié (le « T »), des documents relatifs à l’APP et à la supervision (outils, comptes-rendus, textes…)[50].

6.4 Effets dans l’IFSI et le milieu de la santé

Ces formateurs se sont interrogés sur les effets que pourrait produire le développement de l’APP dans l’institut lui-même, mais aussi et au-delà dans le milieu de la santé lorsque les étudiants devenus professionnels diplômés travailleront dans des services divers. Ils en sont arrivés à formuler des effets sous forme d’hypothèses, à savoir :

6.4.1 Dans l’IFSI

La réussite de la mise en œuvre de l’APP instituée depuis 2009 dans les trois années de formation des étudiants est une valeur ajoutée à la qualité de cette formation et valorise l’IFSI au niveau du CHU et possiblement au-delà. Elle contribue à l’image positive de l’établissement qui a pour mission, entre autres, de former de futurs professionnels réflexifs.

La dynamique du groupe de formateurs APP, sa cohésion, son travail d’analyses de situations de formation internes par une approche multidimensionnelle et multiréférentielle, son ouverture, contribuent à stabiliser des relations au sein de l’établissement et possiblement à lever des incompréhensions, voire éviter des conflits.

Les formateurs de l’IFAS participant à cette supervision, se sentent mieux intégrés au sein de l’équipe pédagogique de l’institut en partageant les mêmes missions et les mêmes intérêts pédagogiques que les formateurs de l’IFSI. Ce groupe de formateurs APP contribue donc à améliorer le sentiment d’appartenance à l’institut.

6.4.2 Dans le milieu professionnel de la santé

Les étudiants, futurs professionnels ayant acquis un savoir analyser et développé une posture réflexive pourront agir, forts de ces acquis, avec une capacité d’adaptation et de créativité ; l’analyse de leur propre pratique (souvent en auto-analyse, hélas faute de groupes d’APP sur le terrain) leur permettra de prendre du recul sur leur vécu ce qui pourrait les apaiser et les aider à prévenir l’épuisement professionnel voire de la souffrance au travail.

La structure qui les emploiera bénéficiera de professionnels qui pourraient être forces de propositions, non des suiveurs, et qui par l’adoption d’un autre regard sur les situations aideront peut-être à faire évoluer les pratiques de terrain et pourquoi ne pas amener à modifier le style de gestion des conflits. Ils pourraient également faire bénéficier les réunions du personnel des compétences développées dans l’animation des APP lors de leur formation.

7. Des évolutions

Au cours de ce cheminement dans la spirale de l’APP et de la supervision, des évolutions, dont certaines directement en lien avec des effets énoncés, ont été repérées et concernent divers aspects de la formation des étudiants, de celle des formateurs, ainsi que le groupe en question.

7.1 Les objectifs

Pour les étudiants et leur formation, les objectifs des ateliers ont évolué, passant de « l’apprentissage de la posture réflexive » à :

  • Apprendre à analyser des situations professionnelles,
  • Développer le savoir analyser ses propres pratiques en prenant du recul par rapport à des vécus professionnels,
  • Apprendre à repérer ce qu’il convient d’apprendre.

Pour les formateurs du groupe, les objectifs de la supervision ont évolué de « l’amélioration de la méta-analyse » (demande originelle) à :

  • Développer le « savoir analyser sa pratique professionnelle »,
  • Développer une posture réflexive avec une posture de praticien réflexif (Schön et al., 1994),
  • Développer le savoir animer des démarches d’APP,
  • Apprendre à repérer ce qu’il convient d’apprendre,
  • Produire un questionnement régulier sur les pratiques professionnelles à partir de situations concrètes qui ont interpellé des membres du groupe,
  • Éclairer les situations par des apports théoriques sur les interactions relationnelles,
  • Permettre la circulation de la parole et améliorer le dialogue dans le groupe, mais aussi dans l’ensemble de l’équipe de l’IFSI,
  • Consolider la cohésion du groupe et développer les compétences collectives,
  • Permettre, grâce à la réflexion et au questionnement, une qualité d’animation et une progression pédagogique lors des ateliers APP mis en place auprès des étudiants,
  • Harmoniser les pratiques d’APP dans l’institut.
7.2 La dénomination des ateliers APP avec les étudiants

Elle a évolué de l’APR (Apprentissage de la Posture Réflexive) vers l’APP (Analyse de Pratiques Professionnelles), car les formateurs, en se référant au référentiel de 2009, ont pris conscience que l’APP est un moyen pour développer la réflexivité, mais que ce n’est pas le seul, car ils en utilisent d’autres dans la formation pour atteindre cet objectif, comme par exemple la simulation. Cette évolution de la dénomination est également liée au fait que les formateurs constatant que les situations analysées avec les étudiants infirmiers et les élèves aides-soignants émanaient de leurs expériences de travail en stage ont admis que le terme « professionnel » s’appliquait à eux bien qu’encore stagiaires en formation aux métiers de la santé.

7.3 La charte

La charte contractualisant l’engagement des formateurs volontaires pour développer l’APP auprès des étudiants et pour participer à la supervision a été établie dès le début de celle-ci en 2014. Elle a ensuite été revisitée chaque année suivante en fonction de la progression du groupe, de sa constitution et de l’évolution de sa réflexion.

Les modifications ont porté sur le fond et la forme en attachant de l’importance à la sémantique employée ; ainsi la charte du « groupe d’APP des formateurs » est devenue la charte des « formateurs animateurs de séances d’APP », la « participation aux APP » avec les étudiants est devenue « l’animation de ces APP », la participation à la supervision a été ajoutée ainsi que la notion de volontariat pour ces formateurs APP ; les objectifs pédagogiques ont été remplacés par les intentions pédagogiques, les principes fondateurs ont été revisités, les engagements des formateurs ont été clarifiés et détaillés, les modalités de coordination du groupe ont évolué, les modalités d’information en cas d’absence et les modalités d’accès et de sortie du groupe ont été rectifiées.

7.4 Les (co) animations

Les animations des APP avec les étudiants ont toujours été menées par un binôme de formateurs et ce avec l’accord de la Direction[51]. Les évolutions constatées à ce niveau sont de plusieurs ordres. D’une constitution des binômes, pourrait-on dire à la sauvette (parfois avec qui était disponible sur le champ), jamais avec le même groupe d’étudiants et sans préparation, les formateurs en sont venus, chaque fois que possible, à se choisir deux par deux, bien en amont des ateliers d’APP et ils ont préparé leurs coanimations à l’aide de fiches que chaque binôme personnalisait. Ils ont essayé de garder le même groupe d’étudiants en APP[52] et chemin faisant ils ont instauré à l’issue de chaque séance un « débriefing », même court, entre eux sur leur coanimation. Ils ont également fait évoluer leurs styles de coanimation à la lumière de celles expérimentées pendant les séances de supervision.

Les animations des APP lors de la supervision ont été majoritairement menées par des binômes, soit ceux des ateliers avec les étudiants, soit des binômes constitués pour la supervision et ce, dans l’idée du « labo » de pouvoir expérimenter des styles, des techniques et/ou des outils qui pourraient être mis en œuvre avec les étudiants. De coanimations improvisées en début de séance au début de la supervision, les formateurs se sont choisis d’une séance à l’autre et ont progressivement préparé leurs animations en binômes, comme pour les APP avec les étudiants, en s’appuyant sur des « fiches de préparation » et en expérimentant des outils co-élaborés.

À partir de la sixième année, quelques formateurs se sont essayés à une « mono-animation » lors de la supervision et ce en lien avec des projets personnels soit pour des séances avec des étudiants, ou dans des structures externes, soit dans l’intention de proposer des APP en travailleur indépendant dans un avenir plus ou moins proche.

7.5 Les compétences des formateurs

Au fur et à mesure de la supervision, les formateurs déclarent « être montés en compétences »

et en avoir acquis de nouvelles. Ils évoquent en premier lieu les compétences relatives au savoir analyser avec une posture de praticien réflexif et au savoir animer avec la transition d’une posture de formateur pourvoyeur de savoirs professionnels à celle d’animateur « compagnon réflexif » (Donnay & Charlier, 2006) inducteur de réflexivité chez l’Autre. Il est cependant à noter des niveaux différents de compétences entre les formateurs ayant bénéficié en amont ou à côté de la supervision, de formations soutenues à l’APP et ceux ayant bénéficié d’une simple initiation si ce n’est sensibilisation à ce concept et à sa pratique.

Ils évoquent également des compétences liées au fonctionnement en binômes, à l’utilisation de la multidimensionnalité et de la multiréférentialité, à la pratique de l’écoute active et de « la parole partagée » (De La Monneraye, 1994), à la connaissance et à la présentation de l’APP, à « l’élargissement d’un savoir-faire social et expérientiel entre formateurs », au travail sur soi permettant, entre autres, de taire son (supposé) savoir et de « lâcher prise »[53], d’« accepter d’être confronté à soi, parfois aux autres » et d’agir « avec humilité et avec le doute », à accepter d’être en APP dans une obligation de moyen plutôt que de résultat, à développer le « tenir conseil » plutôt que de « donner conseil » (Thiébaud & Robo, 2014).

En termes d’évolutions, les formateurs évoquent aussi le transfert de compétences acquises lors de la supervision dans d’autres activités de formation comme les travaux dirigés, l’encadrement de stages, l’accompagnement à la rédaction du TFE, les simulations et leurs débriefings, les entretiens… et pour certains dans leur participation à des réunions institutionnelles.

7.6 Le groupe

Au cours de ces sept années, le groupe a évolué tant dans sa composition que dans ce que l’on pourrait nommer l’ambiance de travail, évolution toujours accompagnée de temps de réflexion.

7.6.1 Sa composition

Quantitativement le groupe a toujours fonctionné avec une quinzaine de membres. Mais il a évolué d’année en année avec des départs temporaires et des départs définitifs de certains (changements d’institut, de fonction ; départs à la retraite ; pour deux ou trois par désintérêt ou manque de motivation pour cette formation) et l’arrivée de nouveaux qui ont dû « monter dans le train en marche » et pour lesquels l’intégration, l’ancrochage (Braida et al., 2017) ont été accompagnés par l’ensemble du groupe.

En cette septième année, il ne reste que trois formatrices qui étaient déjà présentes au départ de la supervision, le reste des membres étant entrés dans le groupe par deux ou trois au fil des sorties et des années. Ces renouvellements ayant conduit chaque année à repréciser et partager les acquis pour faciliter l’intégration des nouveaux.

Au niveau de la coordination du groupe, il y eut passage de relai d’une première à une deuxième formatrice puis à un binôme mixte.

7.6.2 Son « ambiance » de travail

Le groupe est progressivement passé d’une somme de formateurs pratiquant l’APP avec les étudiants à une équipe de « formateurs APP » en tant qu’entité institutionnalisée avec une charte, mais aussi avec une sorte d’identité professionnelle collective de praticiens de l’APP. Petit à petit, se sont installées confiance et reconnaissance mutuelles facilitant le « parler en je », avec modestie et authenticité, mais aussi ce que l’on pourrait nommer une convivance professionnelle grâce au travail et à la réflexion partagés, à la convivialité, le tout placé sous les signes de l’implication et de la coopération. Certains membres du groupe évoquent du « plaisir à participer à ces séances dans ce groupe » et il est arrivé d’entendre à plusieurs reprises, lors du Quoi de neuf ? : « Je suis débordé(e) de boulot, mais j’ai tenu à venir à la séance », « Je suis en perte de motivation professionnelle, mais je viens, car ici je me ressource. »

Il a été également souligné l’intérêt de pouvoir cheminer avec des formateurs de deux écoles (IFSI et IFAS) ce qui permet d’avoir une ouverture socio-professionnelle et donc d’éviter l’enfermement par métier, voire corporation… Le groupe regrettant même l’impossibilité de faire partager cette formation à des formateurs d’autres écoles de l’établissement (IBODE, IADE)[54].

Par ailleurs, l’appartenance à ce groupe maintenant reconnu et les acquis de la supervision, permettent, facilitent, d’après certains membres, une meilleure collaboration avec d’autres formateurs dans l’établissement.

8. Des perspectives ?

Tout au long de ces sept années, le groupe s’est toujours inscrit dans une dynamique de travail et de production avec des projets à moyen et long termes. Ainsi il a été et il est encore affiché la volonté (le désir ?) de ne pas rester sur des acquis, mais de continuer à développer les compétences des formateurs en APP pour savoir mieux analyser leurs propres pratiques professionnelles et pour en faire bénéficier les étudiants.

Certains formateurs ont eu l’intention de développer l’APP sur les terrains de stage en coanimations avec des formateurs de terrain[55] ; quelques-uns y sont parvenus, mais un des écueils rencontrés, outre le temps à trouver pour mener ces APP, est la non-formation de ces formateurs de terrain à l’APP ou des représentations de l’APP totalement différentes avec parfois l’intention de vouloir utiliser celle-ci pour évaluer les étudiants en stage.

Sur mon invitation un projet d’écriture collective pour présenter l’APP développée, pour témoigner et partager, pourquoi pas dans une revue professionnelle, à propos de cette modalité de formation particulière a été lancé… mais il est à ce jour resté à l’état embryonnaire pour des raisons diverses. Se concrétisera-t-il un jour ?

Dans les perspectives évoquées, il y a eu aussi le projet que ces formateurs puissent former à l’APP d’autres formateurs de l’IFSI extérieurs au groupe. À ce jour le projet est resté en l’état bien que la Direction de l’institut ait souhaité, à un moment donné, sa réalisation ; une façon de réinvestir son soutien à la supervision ?

Pour le long terme, il a été question lors de quelques échanges d’un projet de recherche, peut-être dans le cadre d’un Programme Hospitalier de Recherche Infirmière et Paramédicale (PHRIP), recherche portant sur les effets de cette démarche sur la posture professionnelle des futurs diplômés. Cette idée n’a pas eu de suite, possiblement parce que celles qui la portaient ont quitté le groupe. Mais ce n’est qu’une hypothèse comme on dit souvent en APP !

À l’issue de la septième année, le groupe pensait pouvoir prendre un temps de réflexion de quelques mois sur la suite à donner à plusieurs pistes évoquées et susceptibles d’être explorées : la mise en œuvre d’une « sensibilisation à l’APP » pour des collègues cadres formateurs de l’IFSI suivie d’une formation par « compagnonnage », extension de la pratique de l’APP sur d’autres instituts de formation de l’établissement (manipulateurs-radio, préparateurs en pharmacie, infirmier(e)s spécialisé(e)s..), poursuite d’un an de plus avec cet accompagnement-supervision, à raison de deux rencontres ou plus avec moi ou avec une autre personne. Mais la Direction de l’institut a annoncé la suspension momentanée du financement de la formation continue relative à cette démarche. Et cette belle « aventure professionnelle » s’est alors arrêtée.

9. Conclusion

Que retenir aujourd’hui de cette supervision, qui n’est pas une formation de type universitaire et relevant le plus souvent de sensibilisation ou de formation initiale à l’APP, mais qui entre, elle, dans le cadre d’une formation continue à et par l’APP s’adressant à des formateurs déployant eux-mêmes ces démarches depuis plusieurs années avec les étudiants ?

En premier lieu je dirai l’importance évidente, quand on développe de l’APP pour d’autres, de pouvoir bénéficier soi-même d’un accompagnement professionnel relatif aux pratiques que l’on met en œuvre dans ce cadre, car en ce domaine, rien n’est jamais totalement acquis. Je dirai en même temps l’importance de pouvoir inscrire cela dans la durée sur le principe de la formation en alternance favorisant notamment l’articulation pratique-théorie-pratique et donc la théorisation de sa pratique.

Je retiendrai aussi et plus particulièrement quatre dimensions clés présentes dans cette supervision :

  • L’action, qu’elle soit individuelle, en binômes ou collective qui permet à la fois une réflexion ancrée dans / à partir du concret et une mise à l’épreuve de soi et de pratiques professionnelles nouvelles ou renforcées, que ce soit dans le groupe ou avec les étudiants,
  • L’implication de chacun, placée sous le signe de l’authenticité liée à la congruence[56] (Rogers, 1968) et qui contribue à passer de simple agent à acteur puis auteur (Ardoino, 1993) de sa pratique. J’évoque souvent à ce sujet l’aphorisme attribué[57] à Benjamin Franklin « Tu me dis, j’oublie. Tu m’enseignes, je me souviens. Tu m’impliques, j’apprends »,
  • L’altérité présente dans ce groupe de cadres formateurs, groupe hétérogène à différents niveaux (origines professionnelles, parcours, formations, ancienneté, etc.) qui est prise en compte pour nourrir l’intelligence collective et favoriser le socio-constructivisme cher à Vygotsky (1985) puis à Bruner (1996),
  • La coopération à la fois dans l’action, la réflexion et la production d’intelligence collective, mais aussi dans la mise au point d’outils et de documents et même pour la mise en œuvre de moments conviviaux.

Retenir également l’ancrage de cette supervision dans la formation-action avec en particulier l’idée de fonctionner en laboratoire expérimental se basant entre autres sur la fameuse boucle de Kolb (1984) qui, à partir de l’expérience concrète (vécue et relatée) peut conduire à une expérimentation active après observation (analyse) réfléchie puis conceptualisation abstraite. Ce « labo » qui a aussi permis et favorisé l’autorisation[58] (Ardoino, 1993) individuelle et collective : autorisation de dire, de faire, d’essayer, de s’essayer, de produire grâce au cadre posé et aux principes humanistes de la démarche. Ce « labo » qui permettait aussi de tâtonner, d’hésiter, de se tromper (le fameux droit à l’erreur), de s’égarer, de « ramer », en sécurité, sans crainte d’être jugé, d’être mis en difficulté… avec ce leitmotiv souvent évoqué : « il vaut mieux vivre cela dans le groupe plutôt que devant les étudiants »[59].

Je pourrais aussi évoquer l’importance de l’assiduité, du volontariat de présence et de participation inscrits dans la durée déjà soulignée ; évoquer d’autres effets favorables à et produits par cette supervision… Je m’en tiendrai là et soulignerai à cet instant la richesse humaine et professionnelle qui se dégage de cette « aventure » qui a démarré, je le rappelle, par une simple demande d’aide pour la réalisation et l’amélioration de la méta-analyse !

Avant de conclure ici j’exprimerai ce que (me) montre cette expérience sur sept années, à savoir que l’apprivoisement d’une modalité d’APP mise en œuvre, ici le GFAPP plus particulièrement, nécessite, même pour des formateurs attitrés, du temps et une « formation continuée » basée sur un apprentissage expérientiel inspiré du fameux « learning by doing » de Dewey (1938). D’où mon choix, encore aujourd’hui (peut-être changerai-je un jour de point de vue ?) de permettre à des personnes, animateurs ou participants à des groupes d’APP, d’acquérir suffisamment de savoirs et de savoir-faire pour analyser avec efficience des pratiques avec une modalité en particulier, quelle qu’elle soit, avant d’en utiliser d’autres… et ce en pensant à la métaphore énoncée par Freinet (1948) : « Ne vous lâchez jamais des mains… avant de toucher des pieds ! »

Pour conclure cette conclusion, dire que cette supervision ne permet pas de maîtriser sa pratique d’animateur en APP, mais selon la formule que j’ai entendue prononcée par Guy Berger lors d’un séminaire sur l’APP[60], elle permet d’aller vers de la « maîtrise de la démaîtrise », car en APP on ne peut (heureusement) tout maîtriser du simple fait que l’humain y est toujours présent.

Références bibliographiques

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Thiébaud, M. et Robo, P. (2014). Comment aborde-t-on dans l’APP la question de la tendance à demander/donner des solutions, savoirs d’expert ou conseils ? Revue de l’analyse de pratiques professionnelles, 2, 74-90.

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Vygotski, L. S., Piaget, J., Sève, L. P., & Sève, F. (1985). Pensée et langage. Messidor : Éditions sociales.

 

Annexe 1

Esquisse du projet initial de formation analyse des pratiques professionnelles

Action de Formation Continue destinée au groupe de formateurs de l’IFSI-IFAS[61] qui assurent auprès des étudiants infirmiers et des élèves aides-soignants l’animation des ateliers d’analyse des pratiques tout au long de la formation.

Objectifs :

  • Développer le « savoir analyser sa pratique professionnelle »,
  • Développer une posture réflexive avec une posture de praticien réflexif,
  • Apprendre à repérer ce qu’il convient d’apprendre,
  • Développer le savoir animer des ateliers d’APP,
  • Produire un questionnement régulier sur les pratiques professionnelles à partir de situations concrètes qui ont interpellé le groupe,
  • Permettre la circulation de la parole dans le groupe APP et améliorer le dialogue dans ce groupe, mais aussi dans l’ensemble de l’équipe IFSI,
  • Consolider la cohésion du groupe et les compétences collectives,
  • Éclairer les situations par des apports théoriques sur les interactions relationnelles par l’intervenant si nécessaire,
  • Permettre, grâce à la réflexion et au questionnement, une qualité d’animation et une progression pédagogique lors des ateliers mis en place auprès des étudiants et des élèves.

Participants : 

Il s’agit d’un ensemble de 16 formateurs participant à la formation des étudiants infirmiers et des élèves aides-soignants (IFSI IFAS), formés préalablement à l’analyse des pratiques et volontaires pour participer à des séances d’analyse des pratiques entre pairs ainsi qu’à l’animation des ateliers mis en place auprès des étudiants et des élèves.

Moyens pédagogiques :

  • Démarche de formation-action : basée sur l’implication des acteurs,
  • Analyse de pratiques : les situations proposées seront issues de l’animation en co-animation par les formateurs lors des ateliers d’analyse des pratiques des étudiants et élèves,
  • Apports théoriques : comme pistes de réflexion en réponse aux problématiques analysées,
  • Élaboration d’outils au service de l’animation et de l’analyse.

Contenus de formation :

Expression des questions relatives à l’actualité des pratiques professionnelles vécues en groupe avec échanges visant à :

– Développer l’analyse et la recherche sur la prise en charge des besoins liés à la qualité du travail,

– Permettre et organiser des apports de repères pédagogiques et outils appropriés à l’APP,

– Favoriser la prise de recul nécessaire dans les relations entre pairs et avec les étudiants et élèves et contribuer à la régulation du groupe,

– Favoriser des échanges, recherches, apports cliniques.

Durée :

L’action est organisée en 2014 sous forme de 3 rencontres de 4 heures et en 2015 sous forme de 8 rencontres de 4 heures.

Le calendrier d’intervention est établi avec le directeur de l’IFSI et les membres du groupe.

Durée globale dans l’année 2014 : 12 heures et pour 2015 : 32 heures.

Suivi et évaluation de l’action :

La demande de l’IFSI IFAS repose sur le bilan de la mise en place du nouveau référentiel de formation de 2009.

Une grande partie de l’équipe a pu bénéficier d’une formation à l’analyse des pratiques professionnelles auprès de l’IFCS de Montpellier. Conformément au référentiel et parallèlement à un travail de réflexion mené au CEFIEC avec tous les instituts de la région, les ateliers ont été mis en place auprès des étudiants en 2010. Après 3 ans d’exercice, le groupe de formateurs repère qu’un accompagnement est nécessaire afin d’harmoniser les pratiques, de développer une progressivité sur la durée de la formation, de clarifier les objectifs et de progresser dans la méta-analyse. Après une journée d’Analyse des Pratiques assurée en 2014 par l’IFCS, il apparaît essentiel qu’un accompagnement régulier par un formateur expert en APP et extérieur à la structure hospitalière soit mis en place.

Le suivi de l’action s’étalera au cours de l’année scolaire avec une évaluation par semestre de formation pour chaque année ainsi qu’un bilan du déroulement des séances en juillet 2015.

À la fin de l’année 2015 un questionnaire d’évaluation individuel sera rempli par chaque participant afin d’anticiper la continuité éventuelle de la formation en 2016.

Formateur :

Intervenant souhaité : Mr Patrick ROBO

Annexe 2

Charte des formateurs animateurs de séance d’analyse des pratiques professionnelles : IFSI – IFAS – 2019/ 2020

Groupe APP de l’IFSI-IFAS du CHU de xxxxxxx :

Il s’agit d’un groupe de formateurs formés à l’analyse des pratiques professionnelles et volontaires pour animer séances d’APP avec les étudiants-élèves. Chaque formateur développe ses compétences en participant à des sessions de formation à l’animation d’APP ainsi qu’à la supervision du groupe.

Intentions pédagogiques :

  • Développer le savoir analyser et le savoir animer des formateurs animateurs d’APP.

Principes fondateurs :

  • Volontariat, bienveillance, loyauté, confidentialité, respect mutuel, non-jugement, non-conseil, auto-détermination, auto critique, disponibilité, assiduité.

Engagements des formateurs :

  • Se former à l’animation de séances d’APP (par la formation continue ou par le biais de la co animation),
  • Assister aux séances de supervision / formation continue,
  • Participer à toutes les séances d’APP organisées au sein de l’IFSI avec les étudiants, environ une quinzaine de séances par an,
  • Prévoir un temps de préparation et un temps de débriefing après chaque fin des séquences d’APP étudiants-élèves avec son binôme et les formateurs ayant animé l’APP,
  • Assister aux réunions du Groupe de Formateur Animateur de séances d’Analyse des Pratiques Professionnelles.

Modalités de coordination du groupe :

  • Pilote et co pilote du groupe pour l’année 2020-2021 : X et Y.

Missions :

  • Assurer le lien avec le Directeur de l’IFSI et P. Robo formateur consultant. Garantir l’accès à l’information. Planifier les séances d’APP pour l’année suivante. Réguler les inscriptions et la réalisation des séances. Planifier, préparer et animer les réunions du groupe de formateurs animateurs de séances d’analyse des pratiques. Organiser des temps d’intervision entre animateurs si besoin.

Modalités d’information en cas d’absence : 

  • Toute absence à une journée de formation est annoncée par mail à l’ensemble du groupe,
  • Toute absence à une demi-journée d’animation d’APP est anticipée pour son remplacement ; en situation de dernière minute, le formateur prévient directement son binôme.

Modalités d’accès au groupe :

  • Accès : exprimer une demande d’intégration au groupe, être signataire de la charte,
  • Engagement annuel.

Lu et approuvé le                                                     Nom Prénom et signature

 

 

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Notes

[1] Je développerai ultérieurement le type de supervision que je mets en œuvre lui préférant l’appellation d’accompagnement professionnel. J’utiliserai fréquemment le terme de supervision, car c’est l’appellation souvent énoncée par ces formateurs.

[2] Par commodité j’emploierai dans la suite de ce texte le terme générique de formateurs pour désigner ces professionnels de santé même si majoritairement le groupe était composé de formatrices.

[3] Institut de Formation en Soins Infirmiers.

[4] Centre Hospitalier Universitaire.

[5] Institut de Formation des Cadres de Santé.

[6] Par protocole entendre le déroulé, la liste des étapes, des phases d’une séance.

[7] http://probo.free.fr/ecrits_app/grille_phases_gfapp.pdf.

[8] La méta-analyse, qui est instituée dans ma démarche d’APP, consiste, après l’analyse d’une situation, à développer une réflexivité partagée sur des aspects choisis de et à partir de la démarche sans revenir sur l’analyse de la situation.

[9] Par modalité, entendre type, forme, genre (Robo, 2002).

[10] Contrairement à l’idée d’un apprentissage linéaire par accumulations successives de savoir, il s’agit là d’un processus continu qui reprend et s’appuie sur des acquis antérieurs avec une complexification en progression.

[11] Au départ un flou régnait dans l’esprit des formateurs quant à l’appellation et ce qu’elle sous-entendait.

[12] Arrêté du 31 juillet 2009 relatif au diplôme d’Etat d’infirmier

[13] CEFIEC : Comité d’Entente des Formations Infirmières Et Cadres de santé.

[14] Les étudiants bénéficient de deux séances par an au retour de stages sauf les 1ères années qui en ont trois dont une première, pendant le premier stage.

[15] Il apparaîtra que peu de ces formateurs avaient bénéficié pour eux-mêmes de séances d’APP régulières.

[16] Nombre d’heures consacrées à l’APP.

[17] cf. un exemple de convention dans l’article :  https://www.analysedepratique.org/?p=2433.

[18] Il s’agit de formateurs de l’IFSI et de l’IFAS (Institut de Formation d’Aides-Soignants), la formation étant contractualisée par l’IFSI.

[19] Voir au sujet de la mise en place puis au démarrage de groupes d’APP le n° 10 de la revue de l’analyse de pratiques professionnelles : https://www.analysedepratique.org/?p=2461.

[20] Ici genre du métier avec l’acception des sciences et de l’analyse du travail. Le genre pouvant être décliné en styles différents.

[21] « Dispositif de formation professionnalisante consistant en l’ensemble des opérations critiques (observation, analyse, jugement, intervention) par lesquelles une personne en situation de responsabilité vise à améliorer la qualité de l’acte professionnel des personnes dont elle est responsable, de façon à assurer la plus grande cohérence possible entre les référentiels et les pratiques. La supervision s’adresse à des personnes, des groupes ou des équipes et aspire à développer le positionnement, l’engagement et les responsabilités professionnelles » (Castro, Santiago Delefosse & Capdevielle-Mougnibas, 2009.

[22] Métaphore du tireur d’élite capable d’abattre quelqu’un ou de l’expert qui vise mieux, qui sait plus et mieux que les autres dans une posture de tout sachant ou de sachant tout.

[23] Vocable vernaculaire utilisé par les formateurs dans cette formation.

[24] www.probo.free.fr pour l’ensemble du site ou www.gfapp.fr pour la partie consacrée à l’APP.

[25] Je pourrais remplacer métacommunication par métaréflexion.

[26] A ce stade-là c’est le terme multiréférentialité qui est utilisé pour évoquer la multidimensionnalité.

[27] Multidimensionnalité : ensemble des dimensions, facteurs, éléments… repérables et qui (inter) agissent dans et sur une situation, un contexte, une pratique.
Multiréférentialité : Multi références théoriques (sociologiques, éthiques, pédagogiques, axiologiques, communicationnelles, etc.) avec lesquelles on s’intéresse aux dimensions repérées.

[28] Technique inspirée de la Pédagogie institutionnelle permettant de réagglomérer le groupe, à chacun de donner s’il le souhaite l’information de son choix, à tous d’entendre des « choses » qui peuvent avoir une incidence sur le déroulement de la séance, et aux retardataires éventuels de s’installer sans rater le début de l’activité principale de la séance. C’est un lieu de parole institué qui peut être animé à tour de rôle par des formateurs du groupe, avec un rituel, un temps limité et quelques règles de fonctionnement.

[29] Cet outil a évolué au fil du temps et en particulier grâce à des réflexions dans des temps de méta-analyse. Il en est à ce moment-là à la version 23.

[30] Je prétends que l’analyse a lieu et chemine dans l’exposé, les questions, les hypothèses et la conclusion et non seulement dans le temps des hypothèses comme le disent certains. Je dis même qu’elle débute avec le titre donné à la situation pour l’annoncer en invitant ainsi l’exposant à la synthétiser en quelques mots.

[31] Tous ces aspects ont été pris en note par deux formateurs-secrétaires lors de la phase de méta-analyse pour un compte-rendu ultérieur.

[32] Parfois appelée mono-animation.

[33] Au fur et à mesure des séances le groupe s’organise pour prévoir ces collations, parfois « faites maison ». À noter ici que pour lutter contre l’hypoglycémie (l’APP est « mangeuse d’énergie » disent certains) il est autorisé de pouvoir grignoter et boire discrètement durant la séance en restant à sa place.

[34] C’est la dernière phase instituée dans le protocole du GFAPP.

[35] Notion empruntée à la Pédagogie institutionnelle.

[36] Inspirée de la posture du « compagnon réflexif » qui accompagne l’Autre « avec compréhension, mais sans complaisance par rapport au réel » (Donnay & Charlier, 2006).

[37] Pour éviter à la pause les retours vers les messageries, urgences… et les retours tardifs dans la séance.

[38] Selon l’esprit des chevaliers de la table ronde : chacun, après avoir déposé les armes, s’assoit et voit tous les autres.

[39] Cf. La facilitation sociale par une observation externe et l’apprentissage vicariant de chacun qui observe l’autre, peuvent, selon entre autres la théorie de l’apprentissage social de Alberto Bandura (1976), contribuer à l’amélioration des performances des individus.

[40] http://www.jacques-pain.fr/jpwp/pedagogie-institutionnelle/

[41] Ils ne pratiquaient pas d’APP distancielles avec les étudiants, car l’IFSI avait permis que ceux-ci reviennent dans l’établissement après leurs stages pour participer à des APP.

[42] Technique inspirée entre autres du GFAPP et invitant à de l’auto-analyse sur un document en trois parties (colonnes) distinctes ; colonne 1, le récit d’un vécu professionnel personnel ; colonne 2 : les questions qui me viennent par rapport à ce vécu ; colonne 3 : les hypothèses de compréhension de ce qui s’est passé que je formule. Ce document peut éventuellement servir de support à une analyse partagée avec une ou plusieurs personne(s).

[43] À différencier de techniques (utilisant des outils) et selon la définition suivante, Outil : objet fabriqué, utilisé manuellement, doté d’une forme et de propriétés physiques adaptées à un procès de production déterminé et permettant de transformer l’objet de travail selon un but fixé. In Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales https://www.cnrtl.fr/definition/outil.

[44] En prenant la métaphore des petites roues pour apprendre à faire du vélo.

[45] Démarche consistant à fournir des éléments à un apprenant pour faciliter ses apprentissages en s’appuyant sur des acquis antérieurs, éléments dont il n’aura plus besoin ensuite.

[46] Pour les personnes invitées à produire des documents, ici des outils, et n’ayant pas de représentation de ce qu’ils pourraient être, on montre des exemples de tels documents déjà élaborés par d’autres pour susciter leur créativité sans faire de « copier-coller ». Pour faire un yaourt, la recette ne suffit pas ! Il faut avoir un yaourt pour en produire de nouveau.

[47] Sorte de pense-bête, de check-list, de vade-mecum… en guise d’étayage vu l’exercice multi-tâches qu’est l’animation de tels groupes.

[48] Infirmiers Diplômés d’État.

[49] Chaque binôme renseigne un certain nombre d’éléments sur la séance qu’il vient de vivre, ce qui permet un suivi du groupe sur plusieurs séances par différents animateurs.

[50] NB : par respect du principe de confidentialité, le groupe n’a produit aucune trace des situations analysées.

[51] Cet accord de la Direction qui a un impact sur la répartition des heures dues par les formateurs est à souligner comme une reconnaissance de l’APP en tant que démarche efficiente et sensible. Ce qui n’est pas le cas dans d’autres IFSI.

[52] Il faut qu’au moins un formateur puisse suivre le même groupe au cours de la durée totale de la formation des étudiants.

[53] Au début des APP, les formateurs avaient tendance à apporter, lors des méta-analyses, des savoirs liés aux enseignements voire des solutions pour les situations analysées pour répondre aux attentes des étudiants demandeurs et habitués (conditionnés ?) à être « nourris » par les enseignants-formateurs.

[54] Ecoles d’Infirmiers de Bloc Opératoire et d’Infirmiers Anesthésistes Diplômés d’État.

[55] Ceux travaillant dans les établissements d’accueil de stages.

[56] « J’entends par ce mot que mon attitude ou le sentiment que j‘éprouve, quels qu’ils soient, seraient en accord avec la conscience que j’en ai. Quand tel est le cas je deviens intégré et unifié et c’est alors que je puis être ce que je suis au plus profond de moi-même« . (Rogers, 1968).

[57] Aphorisme apocryphe attribué à tort à B. Franklin. Il proviendrait d’anciennes écritures chinoises attribuées à Xunzi (Xun Kuang, IIIème av. JC) qui, bien avant Dewey (1938), évoquait l’importance de l’apprentissage par l’expérience.

[58] Jacques Ardoino s’autorisant (!) à parler aussi d’« auteurisation », à savoir devenir auteur de soi et d’écrits.

[59] Ce qui ne garantit pas d’être toujours « à l’aise en APP » devant les étudiants.

[60] Intitulé « L’analyse des pratiques professionnelles » et organisé par la Direction des personnels administratifs, techniques et d’encadrement (DPATE) de l’Education nationale les 18 et 19 octobre 2001 à la Grande Motte.

[61] Institut de Formation des Aides-Soignants.