Renée Lacroix

Chargée de cours et personne superviseure des stages,
Université de Sherbrooke, Faculté d’éducation, Canada

renee.lacroix[arobase]usherbrooke.ca

Résumé

Le stage pratique en enseignement est une expérience riche et forte, parfois complexe pour un étudiant. Durant la formation initiale, au baccalauréat en enseignement de notre université québécoise, quatre opportunités de stages sont offertes aux étudiants. Ils sont accompagnés pour explorer leurs acquis théoriques, expérientiels et concrétiser leurs idéaux. Ce contexte crée souvent pour eux des situations «  questionnantes  ». Une des visées principales de leur formation est de les amener à réfléchir sur leurs pratiques professionnelles. Nous étudierons ici plus spécifiquement, celles qui misent sur la force de la communauté du groupe de pairs pour réfléchir leurs pratiques. Lier analyse de la pratique et codéveloppement professionnel, pour soutenir ces jeunes enseignants stagiaires est au cœur de l’article.

Mots-clés 

codéveloppement professionnel, stagiaire, pratique réflexive, communauté de pratique, apprentissage expérientiel

Catégorie d’article 

Texte de réflexion en lien avec des pratiques

Référencement 

Lacroix, R. (2021). L’analyse des pratiques professionnelles : accompagner pour faire émerger. Revue de l’analyse des pratiques professionnelles, No 21, pp. 39-48. https://www.analysedepratique.org/?p=5126.


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The analysis of professional practices: to accompany, to bring out
Abstract

The practical teaching experience is a rich and strong one, sometimes complex for a student. During initial training, at the baccalaureate in teaching at our Quebec university, four internship opportunities are offered to students. They are accompanied to explore their theoretical, experiential achievements and to realize their ideals. This context often creates “questioning” situations for them. One of the main aims of their training is to lead them to reflect on their professional practices. We will study here more specifically, those that rely on the strength of the peer group community to reflect on their practices. Linking practice analysis and professional co-development, to support these young teacher trainees is at the heart of the article.

Keywords

professional co-development, trainee, reflective practice, community of practice, experiential learning


 

“Accompagner quelqu’un, c’est ne se placer ni devant,
ni derrière, ni à la place. C’est être à côté.”

Joseph Templier

Au Québec, dans le cadre de la formation initiale des enseignants, le contexte de vie universitaire mise sur le développement de différentes compétences professionnelles. Elles se déploient par les nombreux cours théoriques et par les expériences pratiques vécues par les étudiants. Ils sont accompagnés par des professeurs et des personnes qui supervisent leurs stages tout au long de ces quatre années de formation initiale.

Une de ces douze compétences relève de l’aspect réflexif lié au développement professionnel. Nous constatons que l’apport des cours théoriques permet aux étudiants se s’approprier des savoirs didactiques et pédagogiques variés. Du même coup, ils sont lancés dans un contexte pratique de stage, dans le but de s’approprier, d’incarner et de donner vie à des savoirs expérientiels. Un effet collatéral de cette découverte permet aux étudiants de découvrir quel type d’enseignant ils sont. Ils se retrouvent parfois peu outillés pour effectuer ce passage de la théorie à la pratique. Comment avoir un regard juste sur leur réalité d’action et participer à des exercices réflexifs dans le but d’améliorer leurs pratiques professionnelles ? C’est la problématique qui s’est posée à nous en tant que formatrice superviseure et c’est à partir de ce questionnement que ce projet a vu le jour, il repose sur l’hybridation entre les démarches du codéveloppement professionnel et l’analyse de pratiques professionnelles.

1. La naissance de ce groupe 

Au Québec, la formation initiale au baccalauréat en enseignement préscolaire et primaire de notre université, offre aux étudiants, quatre expériences de stages où les ils sont accompagnés pour explorer leurs acquis théoriques, expérientiels et concrétiser leurs idéaux auprès de jeunes élèves. Considérant le contexte pratique qu’offre le stage en enseignement, dans la visée de permettre aux étudiants de développer leur esprit d’analyse et en tant que personne superviseure de stage les accompagnant tout au long de leur expérience pratique, nous avons choisi de guider un groupe de 10 étudiants dans l’analyse de leurs pratiques professionnelles. Ces derniers sont en 3e année de formation initiale, au baccalauréat en enseignement préscolaire et primaire, de l’Université de Sherbrooke. Au terme de cette formation initiale, les étudiants auront leur permis d’enseigner et seront en mesure de faire leur entrée dans la profession.

Au cours de cette année, les étudiants réalisent un stage qui se déroule en trois blocs, durant une année universitaire (45 jours au total). Ils prennent contact, à la rentrée scolaire, avec leur groupe d’élèves. Ils poursuivent, pendant trois semaines à l’automne (mi-octobre) et ils terminent pour un mois complet en janvier. Ils font donc des allers-retours entre leur milieu de pratique en classe et leur milieu d’apprentissage universitaire.

Ce groupe a été priorisé puisque c’est la première occasion que les étudiants se retrouvent seuls à enseigner en comparaison aux deux premières expériences pratiques où ils sont en binômes. Nous avons également ciblé ce groupe puisque la responsabilité professionnelle, tant dans le temps de prise en charge, que dans leur engagement dans le milieu scolaire est marquante. Ceux-ci sont réunis selon le contexte suivant : ils sont en processus de réalisation de leur 3e stage de formation et ils reçoivent tous la même formation initiale universitaire. Leur contexte de classe, leur réalité professionnelle et personnelle ainsi que leurs expériences antérieures amènent des nuances distinctes pour chaque membre du groupe, en plus des approches pédagogiques privilégiées dans leur milieu de stage. Leur identité professionnelle, comme enseignant, demeure également un élément distinct pour chaque participant puisque cette donnée fait référence à un aspect personnel pour chaque stagiaire.

Finalement, le rôle de la personne superviseure est d’accompagner les étudiants dans le développement de leurs compétences professionnelles, dont celle de réfléchir avec eux, sur le développement de leurs pratiques professionnelles. Cet accompagnement se traduit par des visites dans leur milieu scolaire et par quatre séminaires ; des moments d’échange, entre stagiaires et animés par la personne superviseure.

Faisant un va-et-vient entre leur contexte pratique et leur formation universitaire, les étudiants sont sollicités durant ces séminaires de stages et leurs cours universitaires à réfléchir, avec leurs pairs, sur leurs expériences vécues en formation pratique.

2. La force de la communauté au service de chaque étudiant

Ce contexte est donc favorable pour leur permettre de prendre une position de recul face à leur pratique d’enseignant et de pouvoir analyser leur action et ce, à différents moments de leur 3e année universitaire. Comme le précisent Thiébaud et Vacher (2020, p.48) : « la constitution d’un groupe, à partir d’une collection d’individus, est importante pour parvenir à élaborer un travail en collectif apprenant ». Ils mentionnent l’importance des dimensions suivantes : les liens créés entre les participants, le développement des valeurs partagées, le sentiment d’appartenance et la richesse des perceptions et des réflexions qui émergent et grandissent au sein du groupe comme des variables importantes à tenir en compte. Finalement, ils abordent la confiance, une variable essentielle à la formation du groupe. Ces variables sont donc des leviers ciblés par la formation de cette jeune communauté de pratique pour leur offrir un « espace réflexif » significatif qui se poursuit tout au long de leur expérience pratique.

Les problématiques proposées

Notre bagage professionnel, cumulé à travers plusieurs années d’accompagnement, comme personne superviseure des stages, nous permet de constater que les problématiques rencontrées, lors de ce stage, sont habituellement homogènes étant donné leur début de carrière, leur manque d’expérience et de référent pour appuyer leurs actions pédagogiques. Les difficultés liées à une planification incohérente ou les défis liés à la gestion de la classe font partie des réalités «  questionnantes  » pour ces futurs enseignants. L’isolement et le manque de possibilité d’échanger sur leur vécu semblent également faire partie de leurs besoins à combler.

3. La force du lien entre la démarche du codéveloppement professionnel et l’APP

La démarche de codéveloppement professionnel est préconisée pour ce projet. Elle se traduit selon Payette et Champagne (1997, p.7) comme une approche de formation « qui mise sur le groupe et sur les interactions entre les participants, pour favoriser l’atteinte de l’objectif fondamental ; améliorer la pratique professionnelle ».

Nous avons offert une formule hybride entre la démarche de codéveloppement professionnel et l’analyse des pratiques professionnelles, et ce, pour deux des étapes initiales que propose le codéveloppement. Cet ajustement, sans dénaturer la démarche initiale, nous a semblé significatif pour favoriser le cheminement réflexif de nos étudiants, dans leur contexte de pratique.

En analysant une situation pratique, les jeunes enseignants s’engagent à être guidés et soutenus par la démarche ajustée et préconisée, par le groupe de pairs et par la personne superviseure pour analyser la situation problématique ciblée. Cette approche ajustée est préconisée, car, malgré le peu d’expérience au niveau de leur pratique d’enseignement, la démarche en elle-même les aidera à développer leur pensée réflexive.

3.1 La démarche au service des étudiants

Quatre rencontres sont prévues durant l’année universitaire. La première sert de « brise-glace » pour que le groupe puisse créer une synergie, que les membres puissent se présenter et que l’on puisse leur expliquer la démarche en théorie. À ce moment, les étudiants ont rencontré leurs élèves, mais leur court passage en classe et la réalité du début de l’année scolaire font que les contextes «  questionnants  » n’ont pas nécessairement encore émergé. Les trois autres séances sont donc consacrées, exclusivement, à l’application de la démarche pour permettre aux étudiants d’analyser leur pratique professionnelle. Un soutien visuel[1], explicitant les étapes à suivre ainsi qu’un guide concis sur l’art du questionnement, leur sert d’appui pour orienter les séances.

La participation volontaire et active des étudiants est un élément essentiel pour s’engager au sein du groupe. C’est surtout le contexte de participation qui est un agent de facilitation pour dénouer ces situations professionnelles complexes pour eux. Considérant que la liberté d’action est un appui important à une participation active et à l’engagement, nous avons donc misé sur cette prémisse pour favoriser la création de cette communauté d’apprentissage. Comme l’explicite Viau (1997, p. 7) : « La motivation est un concept dynamique qui a ses origines dans la perception qu’un élève a de lui-même et de son environnement et qui l’incite à choisir une activité, à s’y engager et à persévérer dans son accomplissement afin d’atteindre un but ».

3.2 La démarche explicitée selon les six étapes

La démarche du codéveloppement professionnel préconise une réflexion en amont de la séance que l’on appelle l’étape 0. Nous invitons les participants à réfléchir sur une situation de leur pratique qui les a questionnés et qu’ils souhaiteraient « déplier[2] » avec le groupe. Nous proposons donc aux étudiants de réfléchir à une situation à soumettre aux pairs qui les questionne, avant la première séance, pour avoir en tête un contexte d’analyse à exposer au groupe. Cette mesure de facilitation est bénéfique pour eux, car ils ont pris le temps de réfléchir et de choisir une situation à exposer pour solliciter la force du groupe pour y réfléchir et arriver à trouver leurs propres solutions à ce contexte problématique. Payette et Champagne (1997) affirment que le fait de nommer et de présenter sa réalité oblige le narrateur à « compléter ses phrases dans sa tête » et à aller au bout de ses idées en les précisant. Cet élément nous semble marquant pour inviter les stagiaires à réfléchir, à revoir mentalement cette situation pour réfléchir ce sur quoi, le soutien du groupe de codéveloppement serait une plus-value pour nourrir leur réflexion personnelle. Chaque participant présente brièvement l’événement choisi et le collectif détermine, selon l’axe de l’urgence et de la convergence des propos, la situation qui sera exposée au groupe.

L’étape 1 de la démarche de Payette et Champagne (1997) propose une présentation sommaire du contexte partagé avec le groupe. L’étape 2, quant à elle, propose des questions de clarification de la part des autres membres du groupe, pour préciser et détailler la situation partagée. Selon la démarche initiale, l’étape 3 amène à prioriser un objet d’échange en demandant au narrateur de cibler son besoin. Nous nous sommes permis un petit écart à la démarche initiale à la suite de réflexions avec d’autres praticiens qui utilisent d’autres approches d’analyse professionnelles et en sommes venus à faire évoluer le contenu de l’étape 3[3]. Nous proposons donc à chacun de reformuler sa compréhension de la situation soumise. Les participants proposent leur lecture de la situation et peuvent proposer des « hypothèses de compréhension[4] » du contexte présenté. L’ajout de la formulation hypothétique laisse place, pour la personne narratrice, à voir sa situation, selon différents angles. Le narrateur reçoit le tout, sans prendre position. Les interprétations des membres éclairent, parfois, la situation initiale proposée. Cela laisse donc le narrateur libre d’explorer ce qui représente le « problème » dans ce contexte.

Enfin, on demande ici au narrateur de préciser l’angle d’analyse de sa situation qu’il choisit d’explorer.

Pour l’étape 4, les participants sont invités à partager ouvertement les pistes de solution envisageables à la situation proposée. L’objectif prioritaire de cette étape est de permettre au narrateur d’arriver à repérer des pistes d’actions concrètes qu’il pourra analyser plus spécifiquement. Finalement, l’étape 5 redonne la parole à l’étudiant qui partage son contexte « questionnant », en lui demandant quelles sont les pistes retenues ou les réflexions qu’il choisit de poursuivre, selon sa réalité, son contexte et ses visées.

Nous avons également proposé une petite distinction à l’étape 6 qui se fait de façon collective habituellement. En effet, la démarche de Payette et Champagne (1997) propose un tour de table pour faire verbaliser. Ainsi, chaque participant s’exprime sur son vécu lors de la séance ; sur les retombées que la situation proposée a sur la réalité professionnelle de chacun. C’est la première étape réflexive de la démarche que nous avons scindée, en deux temps, pour les besoins de notre projet. À ce niveau, dans le but de faire cheminer chaque étudiant qui a vécu la démarche, nous priorisons l’échange collectif en un premier temps. Thiébaud et Vacher (2020) parlent d’une invitation à un moment de réflexion : « Qu’est-ce qui se dégage pour vous de cela ? » La participation des participants ici est de leur donner un moment réflexif et de partage pour saisir ce que chacun ajoute à son « bagage professionnel » à la suite de cet échange en communauté de pratique.

Nous avons cru utile d’ajouter une sous-section qui s’écarte un peu de la démarche initiale du codéveloppement professionnel. Sans vouloir dénaturer la démarche si formatrice en soi, nous souhaitions matérialiser le cheminement individuel des étudiants par l’amplification des processus réflexifs. Cette seconde partie de l’Étape 6 prend forme par la création d’un journal réflexif individuel pour colliger des réflexions, des émotions, des questionnements toujours vivants et des doutes qui persistent du point de vue du novice. Le contenu élaboré dans ce journal sera, selon la volonté de l’étudiant, matière à discussion avec la personne superviseure qui guide les participants dans cette démarche. Ces rencontres en binôme, entre l’étudiant et la personne superviseure, sont des moments privilégiés d’échange pour favoriser le transfert des apprentissages qui ont émergé au sein de la séance de codéveloppement et qui s’appliqueront dans leur réalité pratique personnelle. C’est aussi prioritaire de laisser une place importante à la vulnérabilité des jeunes enseignants pour qu’ils puissent être ouverts et à l’aise pour réfléchir à leurs forces et leurs défis à déployer. Cet espace personnel représente pour nous un élément à prioriser dans la démarche en cours. Nous y ajoutons cette portion analytique, individuelle personnelle, soutenue par l’écriture, comme proposée par Holly (1989), pour favoriser l’appropriation des apprentissages vécus durant la séance et pour conserver des traces de l’évolution réflexive vécue par les stagiaires aux trois séances distinctes. Ces données serviront, ultérieurement, à la réalisation d’un devis[5], qui représente leur travail réflexif final, associé à leur expérience globale de leur stage.

4. L’analyse des pratiques professionnelles : la réflexion implicite qui devient explicite

Un apport majeur de la démarche du codéveloppement demeure la force de la communauté. Les séances ont donné lieu à l’analyse[6] des pratiques dans les contextes académiques distincts et variés concernant, entre autres, les sujets suivants : le contexte de la classe, les différentes clientèles et des besoins spécifiques des élèves. Nous remarquons que depuis le début du projet, les propos soumis à la réflexion collective et rassemblés concernent principalement des situations de gestion de la classe ou des problématiques éthiques rencontrées par nos étudiants.

Nous constatons également que la démarche d’analyse se déploie en deux modalités : collectivement, à travers la démarche proposée, mais aussi en binôme, par l’implication de l’étudiant lors des rencontres avec la personne superviseure suivant chaque rencontre de codéveloppement. De plus, un moment en individuel nous semble essentiel à prioriser pour permettre à l’étudiant à bien accueillir les propos partagés par les pairs et de lui permettre d’analyser, en solo et ensuite, avec le soutien d’une personne significative dans son cheminement professionnel, les enjeux qui demeurent nébuleux pour lui. Cette rencontre, en binôme, se déroule quelques jours après la séance de codéveloppement, pour laisser place à la perspective face au contexte analysé et pour donner l’opportunité à l’étudiant de réfléchir individuellement à ce qui fait sens pour lui, selon la situation proposée.

Nous constatons un effet bénéfique à ce temps de dépôt, entre la séance collective, l’écriture spontanée en fin de rencontre et le temps d’analyse soutenu, au besoin, par la personne superviseure. Cette séquence permet à l’étudiant de se questionner sur ce qu’il souhaite adresser, dans son milieu, pour saisir l’évolution de sa pratique, ce qu’il choisit d’ajuster ou ce qu’il poursuit comme réflexion sur son action. Ce recul nous permet d’affirmer qu’il est significatif, pour les étudiants, de laisser « mûrir » leur pensée et de l’appuyer sur leurs propres ressources et ressentis. À la suite de cette réflexion, leurs propos sont plus clairement explicités lors de la rencontre en binôme ce qui permet d’échanger entre les deux parties.

Le but de ce projet est en fait de formaliser la démarche de codéveloppement professionnel avec des étudiants et de rendre compte d’une pratique d’accompagnement distincte comme le soulève Paul (2005) « Il s’agit de se joindre à quelqu’un pour aller où il va en même temps que lui, à son rythme ». Ce recul nous amène, comme personne superviseure, de prendre conscience de la complexité qui perdure autour de la profession enseignante et nous permet d’embrasser des enjeux importants que les jeunes enseignants doivent apprendre à affronter. La force du dialogue, à soi ou à l’autre, demeure une porte d’entrée sur la reconnaissance de ses forces et de ses limites. Il permet pour les jeunes enseignants un lieu d’échange et d’appartenance.

5. La continuité du projet

Nous en sommes à notre troisième année pour la mise en place de cette pratique qui se veut un contexte idéal pour arrimer théorie et pratique, mais surtout, pour favoriser, chez nos étudiants, le développement de l’analyse de leur pratique professionnelle. Nous constatons que les liens entre la théorie et la pratique s’avèrent un défi considérable dans un contexte professionnel initial et que la démarche de codéveloppement propose, aux étudiants enseignants, un contexte d’apprentissage où la confiance et la liberté donnent prétexte, comme l’explicite St-Arnaud (1992), à l’utilisation d’un petit groupe comme moyen d’apprentissage.

Les effets conjugués de la démarche du codéveloppement professionnelle et de l’analyse des pratiques professionnelles nous amènent à constater l’accompagnement réflexif, riche et soutenu, des étudiants entre eux. Ils ont eu principalement le temps, le soutien et l’espace dont ils avaient besoin, pour réfléchir à leur vécu pratique.

L’état actuel des conditions d’entrée dans la profession est complexe. Cela nous amène à être conscient de l’importance d’outiller nos étudiants à l’importance du développement de la pratique réflexive, pour développer leur savoir analyser personnel et collectif. Le groupe a donc contribué à l’émergence de pistes réflexives pour favoriser, chez nos étudiants, l’analyse de leur pratique professionnelle. Ils sont en mesure de constater que certaines situations soumises au groupe de codéveloppement ne leur sont pas nécessairement arrivées, mais ils peuvent « transférer » ces apprentissages à d’autres situations de leur réalité et avoir le sentiment d’un meilleur « contrôle » sur leur action.

Ce groupe poursuivra sa lancée et un nouveau groupe verra le jour dans le futur. Il est prévu de former un collectif, en première année de formation, pour les initier à la démarche sur un espace-temps de quatre ans, pour ainsi voir les effets bénéfiques de l’application de la démarche à long terme.

Cette communauté d’apprentissage est mise en place pour accompagner et soutenir ces étudiants en cours de formation et pour favoriser la réflexion tout en leur offrant un « prétexte » pour s’approprier et améliorer leur « savoir analyser » comme futur enseignant.

Références bibliographiques

Dumoulin, M-J. et Desjardins, J. (2019). Un modèle de codéveloppement professionnel en formation continue des enseignants associés au Québec pour déjouer l’opposition entre reconnaissance et mise en question du savoir d’expérience. Dans P. Guibert, J. Desjardins, O. Maulini. & X. Dejemeppe, X. (Eds). Questionner et valoriser le métier d’enseignant, une double contrainte en formation (157-178). De Boeck.

Holly, M.-L. (1989). Reflective Writing and the Spirit of Inquiry, Cambridge Journal of Education, 19 (1), 71-80.

Paul, M. (2005). L’accompagnement : une posture professionnelle spécifique. L’Harmattan.

Paul, M. (2016). La démarche d’accompagnement, repères méthodologiques et ressources théoriques. De Boeck.

Payette, A. et Champagne, C. (1997). Le groupe de codéveloppement professionnel. Les Presses de l’Université du Québec.

St-Arnaud, Y. (1992). Connaître l’action. Presses Universitaires de Montréal.

Thiébaud, M. et Vacher, Y. (2020). L’analyse de pratiques professionnelles dans une perspective d’accompagnement, d’intelligence collective et de réflexivité. Revue de l’analyse de pratiques professionnelles, 18, 43-69.

Viau, R. (1997). La motivation en contexte scolaire. De Boeck.

Annexe

Outil de référence proposé aux étudiants lors des séances de codéveloppement professionnel

Figure 1 : Les étapes de la démarche de codéveloppement professionnel (Payette et Champagne, 2010), telles qu’adaptées et présentées par la Pre Marie-Josée Dumoulin en 2015, lors d’une rencontre avec les personnes superviseures du baccalauréat à l’enseignement au préscolaire et au primaire de l’université de Sherbrooke.

 

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Notes

[1] Voir document ajouté en annexe, à la fin de l’article.

[2] Selon Desjardins et Dumoulin (2019), déplier prend le sens ici d’analyser la situation selon différents angles au bénéfice de la clarification de celle-ci.

[3] Cette évolution a été influencée par notre participation, en 2018, à des formations organisées par Maela Paul et Patrick Robo sur les démarches d’accompagnement et l’APP. (Maela Paul, 2016)

[4] Appellation reprise de Patrick Robo lors de la formation sur les démarches d’accompagnement et d’APP, octobre 2018.

[5] Le devis est un travail réflexif qui sert à faire une rétrospective de ses apprentissages pratiques, en contexte de stage, du début de la formation universitaire à ce jour.

[6] Analyse : étude faite en vue de discerner les différentes parties d’un tout, de déterminer ou d’expliquer les rapports qu’elles entretiennent les unes avec les autres (Ex. : Analyse d’une œuvre littéraire)